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REVUE. — CHRONIQUE.

Le reproche d’avoir troublé la paix de l’Espagne s’adresse-t-il aux partis ? Nous le voulons bien. Mais pourquoi le parti exalté a-t-il troublé à main armée la paix dont l’Espagne jouissait sous l’administration de la reine Christine ? Pourquoi l’insurrection militaire, légitime en 1840, serait-elle un crime en 1841 ? Ces récriminations n’ont pas de sens. C’est demander pourquoi l’Espagne est ce qu’elle est, au lieu d’être un pays fortement constitué et réunissant toutes les conditions d’un ordre social stable et régulier.

Voyez l’Amérique du Sud : que manque-t-il à ce vaste et magnifique pays ? Des élémens d’ordre et de paix publique. L’inertie dans les masses, et chez les hommes d’action des passions ardentes et peu de lumières ; que peut-il en résulter, si ce n’est l’anarchie ?

L’Espagne aussi ne cessera d’être agitée et déchirée par quelques poignées d’hommes ardens jusqu’au jour où le pays, secouant enfin sa longue léthargie, ne voudra plus être spectateur indolent des sanglantes saturnales des partis. Ce jour-là ce ne seront ni les absolutistes ni les exaltados qui prendront le gouvernement du pays. Le jour où le vœu national pourra réellement se faire entendre, l’Espagne arborera le drapeau de la liberté et de l’ordre ; elle aussi entrera, avec les admirables moyens dont la Providence l’a dotée, dans les voies de la civilisation moderne, sous l’égide de la monarchie constitutionnelle.

L’Angleterre paraît menacée d’une crise financière. Une baisse extraordinaire a frappé tout à coup les fonds anglais. Les esprits timides en ont conçu quelques alarmes. Ils ont imaginé que la panique des hommes de bourse trahissait des craintes sérieuses d’une guerre prochaine. La baisse des fonds n’est due, ce nous semble, qu’à l’emprunt que réalise dans ce moment le gouvernement anglais. Par cela même que les souscriptions n’ont pu atteindre le chiffre de 5 millions sterling, elles prouvent que la place a des engagemens énormes, et que l’argent y est rare. Parmi les souscripteurs, il se trouve sans doute des spéculateurs imprudens qui, trompés dans leur attente, sont maintenant forcés de vendre à tout prix. L’Angleterre ne pourrait dans ce moment avoir de démêlé sérieux qu’avec les États-Unis. Sans doute si Mac-Leod était condamné, ou si, acquitté par le jury, il était égorgé par la populace, sans que le gouvernement américain intervînt d’une manière efficace pour prévenir ou réprimer ces excès, le gouvernement anglais ne pourrait pas dévorer cet affront. Toutefois, dans cette triste hypothèse, il n’est pas à croire qu’il débutât par une déclaration de guerre et par des actes d’hostilité. Il demanderait d’abord une réparation éclatante, réparation que les États-Unis pourraient difficilement lui refuser, car une guerre dans ce moment serait encore plus funeste aux Américains qu’à l’Angleterre. Leur marine militaire est faible, leurs côtes sont désarmées, leurs finances délabrées, et plus d’un élément de discorde agite l’Union et la menace d’un déchirement prochain.

Le président a sanctionné le bill qui frappe d’un droit de 20 pour 100 ad valorem les denrées importées en Amérique. Les efforts de notre ministre,