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LE CONSEIL D’ÉTAT.

il a pour objet de rendre la discussion plus élevée, plus large, plus complète : de là résultent plusieurs différences.

Pour les affaires administratives, le service extraordinaire ne doit se composer que de fonctionnaires de l’ordre administratif, et il doit toujours être en nombre inférieur à celui du service ordinaire ; il faut que celui-ci ne cesse jamais d’exercer dans le débat une influence prépondérante : si les nombres se balançaient, les traditions seraient sans force et la jurisprudence sans fixité ; si le service extraordinaire avait la majorité, l’administration serait chargée de son propre contrôle, et le conseil d’état disparaîtrait. Le service extraordinaire pour les affaires administratives doit être attaché au conseil d’état d’une manière permanente, afin d’être au courant de ses précédens et de pouvoir les prendre en considération dans le débat. À ces conditions, il atteindra le but pour lequel il est institué ; le concours de l’action avec la délibération éclairera celle-ci sans l’étouffer, et amènera des communications réciproques et une fusion d’idées qui empêcheront respectivement les bureaux de s’enfermer dans d’étroites pratiques, et le conseil de s’égarer dans des théories sans application.

Pour la discussion des lois et règlemens, le conseil d’état ne peut contenir trop d’élémens d’un débat sérieux, vrai, approfondi ; il faut qu’il puisse profiter de l’adjonction de savans et d’hommes d’art pour l’examen de certains sujets spéciaux ; les magistrats de l’ordre judiciaire, éloignés de son sein depuis 1830, et souvent regrettés à bon droit, doivent lui porter le tribut de leurs graves doctrines et de leurs sévères traditions ; souvent aussi des membres des deux chambres, étrangers à l’administration, mais versés dans les matières en discussion, peuvent lui prêter un utile concours. S’il est convenable que ces adjonctions réunies n’absorbent pas la majorité, il n’est peut-être pas nécessaire d’en limiter le nombre ; cette limite résultera de la nature des choses. Enfin, pour prévenir l’encombrement et faciliter les combinaisons que réclame la variété des sujets à discuter, les adjonctions doivent n’être que temporaires, pour une discussion déterminée, et ne conférer par conséquent aucun titre à ceux qui en seront l’objet.

D’après ces considérations, il conviendrait, ce me semble, en ce qui concerne la branche utile du service extraordinaire, d’adopter à la fois, 1o la proposition du gouvernement qui y comprend, avec les titres de conseillers d’état et de maîtres des requêtes, certains fonctionnaires désignés et en nombre limité, en n’appliquant cette mesure qu’aux affaires administratives proprement dites, et 2o la propo-