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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

saient de plier devant ses caprices[1]. Des plaintes furent portées à la diète par le roi d’Angleterre qui demandait réparation des injures que lui avait adressées son pupille, et par les états du duché qui réclamaient contre la suppression illégale de la constitution. La plainte des états ne fut pas accueillie ; mais le duc fut condamné à rétracter ses calomnies contre son tuteur, ce qu’il fit dans les termes les plus dérisoires et les plus insultans, et en déclarant qu’il n’accorderait rien de plus. Après quoi, pour se débarrasser de l’ennui que lui donnait cette affaire, il laissa l’administration de son état à ses favoris, et s’en alla à Paris dépenser au sein des plaisirs l’argent qu’il avait retiré de ses exactions.

Il s’y trouvait au moment de la révolution de 1830, qui le força à revenir dans sa capitale où il se montra plus despote et plus hautain que jamais. Des réclamations lui ayant été adressées pour l’allégement des charges publiques et pour la convocation des états, il les repoussa avec une dureté superbe, déclarant qu’il saurait mieux défendre sa couronne que Charles X, et il fit aussitôt braquer des canons sur une des places de la ville ; mais ces démonstrations, au lieu d’effrayer le peuple, l’irritèrent et l’exaspérèrent. Le 6 septembre au soir, comme le duc sortait du spectacle, sa voiture fut assaillie à coups de pierres, et il ne dut son salut qu’à la vitesse de ses chevaux. Le lendemain, l’insurrection devenant de plus en plus menaçante, et les soldats paraissant peu disposés à faire couler le sang de leurs concitoyens, il s’enfuit en toute hâte, pendant que la multitude saccageait son château et le livrait aux flammes. Les bourgeois s’armèrent pour rétablir la tranquillité, et y parvinrent sans beaucoup de peine. Le prince Guillaume, frère cadet du duc, prit le gouvernement à sa place, aux grands applaudissemens du peuple : il renvoya le ministère existant, reconnut les états, promit une nouvelle constitution[2], et tout rentra dans l’ordre. La diète, après de mûres délibérations[3], se déclara convaincue de la complète inaptitude du duc Charles au gouvernement, et donna son assentiment à ce qui

  1. Voici un trait parmi bien d’autres. M. de Cramm, qui avait rédigé une pétition des états à la diète germanique, étant malade, le duc fit de vifs reproches à un médecin qui lui avait donné des soins, et récompensa un chirurgien qui avait refusé ses services à Mme de Cramm au moment de son accouchement. Pour plus de détails, on peut consulter l’ouvrage de Koch : Der Aufstand in Braunschweig am 6 und 7 september.
  2. Cette constitution fut donnée le 12 octobre 1832.
  3. La résolution de la diète est du 2 décembre 1830.