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est le code de procédure de l’inquisition. Dans cet ouvrage, devenu absolument introuvable en Italie, et dont nous possédons une édition faite à Rome en 1730, on trouve les preuves de ce que nous avançons, c’est-à-dire que, selon leurs terribles lois, les inquisiteurs auraient été absolument répréhensibles, si, dans la position où était Galilée, ils ne l’avaient pas soumis à la torture pour connaître son intention. Pour caractériser cet ouvrage, d’après lequel on a condamné un des plus grands esprits qui aient honoré l’humanité, il suffira de dire qu’on y parle des gens qui tiennent le diable dans des bagues, dans des miroirs ou dans des caraffes.

Au reste, ce fait se rencontre plusieurs fois dans le même siècle. Sans rappeler Giordano Bruno et Dominis, tous les deux philosophes et physiciens, morts également victimes de l’inquisition, du vivant de Galilée, il suffira de citer Oliva, physicien éminent et membre de la célèbre académie del Cimento, qui, long-temps après le procès de Galilée, fut amené à Rome devant l’inquisition, et soumis à des tourmens si affreux, que, pour en prévenir le retour, il mit fin à ses jours en se jetant par une fenêtre. Nous le répétons, les inquisiteurs n’ont pu, sans manquer à leurs cruels devoirs, s’empêcher de soumettre Galilée à la torture, et, au lieu de s’en défendre, ils l’ont avoué dans leur langage en disant qu’ils l’avaient soumis au rigoureux examen.

Le courage de Galilée ne se démentit jamais durant cette terrible persécution, et à peine était-il arrivé à Sienne, qu’il reprit ses travaux. Pendant les cinq mois qu’il resta dans cette ville, il poursuivit ses recherches sur la résistance des solides, mais ce qu’il avait écrit à ce sujet est perdu. Il dut croire que ses ennemis s’apaisaient un peu lorsque, vers la fin de l’année, il obtint du pape la permission d’habiter, près de Florence, une maison de campagne qu’on lui assigna pour prison. Mais la rigueur ne tarda pas à reparaître, car ayant sollicité l’autorisation d’aller dans la ville, ou au moins la faculté de recevoir ses amis, il reçut pour réponse l’injonction de s’abstenir désormais de toute demande, sous peine de se voir contraint de retourner à Rome dans la prison véritable de l’inquisition. Cette réponse, qui lui fut transmise par l’inquisiteur le jour même où les médecins lui annonçaient qu’une fille chérie, qui l’aidait à supporter ses malheurs, n’avait plus que quelques heures à vivre, le plongea dans la consternation. Cependant, bien qu’accablé par l’âge, par les chagrins et les infirmités, il consacra tous ses instans à composer de nouveaux ouvrages, fruit de ses méditations, et quoique, vers la fin de 1637, il perdit totalement la vue, qui