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GALILÉE.

au mois d’avril il fut contraint de se rendre dans les prisons de l’inquisition, où il resta environ quinze jours, et où il subit un interrogatoire. On le renvoya ensuite chez l’ambassadeur ; enfin, le 20 juin suivant, il fut ramené à l’inquisition pour entendre l’arrêt qui proscrivait son livre et condamnait l’auteur à la détention dans les prisons du saint-office, suivant le bon plaisir du pape. On lui fit aussi abjurer ses erreurs, et promettre en chemise et à genoux de ne jamais parler ni écrire sur le mouvement de la terre, que la sentence condamnait comme une opinion fausse, absurde, formellement hérétique et contraire aux Écritures.

Cette condamnation, qui révolta tous les esprits élevés, et dont les conséquences rejaillirent sur tous ceux qui avaient coopéré à la publication de ce Dialogue, fut publiée par des mandemens. On la promulgua publiquement à Florence dans l’église de Santa-Croce, devant les amis et les élèves de Galilée, que l’inquisiteur avait convoqués. Elle fut transmise avec apparat à toutes les cours et aux corps les plus illustres, et, par une singularité remarquable, le célèbre Jansénius, qui bientôt devait être condamné à son tour, fut chargé de la communiquer à l’université de Louvain. Une telle rigueur a fait naître un doute bien grave sur la question de savoir si, pendant le procès, Galilée avait été soumis à la torture. Les uns ont été plus frappés de certaines concessions faites à Galilée, que de la sévérité exercée contre lui. La permission de rester chez l’ambassadeur Niccolini, la prompte délivrance des prisons du saint office, la permutation de la peine (car, au lieu de le retenir en prison, on le relégua d’abord dans le jardin de la Trinità dei Monti et bientôt on lui permit d’aller à Sienne chez l’archevêque Piccolomini, d’où il partit pour se retirer dans une maison de campagne près de Florence) ont semblé à des savans distingués exclure toute possibilité de torture sur un homme protégé spécialement par le grand-duc de Toscane.

D’autre part, les écrivains qui ont eu à leur disposition la correspondance inédite de Galilée, et qui ont pu consulter les pièces originales, se sont déclarés pour l’opinion contraire. Le sénateur Nelli surtout, qui a composé un grand travail sur Galilée, a cru que le philosophe avait été torturé, et son autorité est d’un grand poids dans cette question. Il serait impossible de reproduire ici tous les argumens qui ont été développés en faveur de l’une ou de l’autre opinion, d’autant plus qu’actuellement les pièces manquent, et que, dès le commencement, le procès de Galilée a été enveloppé dans un mystère impénétrable. On sait par la correspondance de Niccolini que