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anciennes doctrines publièrent un si grand nombre d’écrits. Ces éloges, ces discussions qui étaient encore un succès, irritèrent de plus en plus les moines, qui ne tardèrent pas à faire comprendre à la cour de Rome le danger de ce livre. Mais, au lieu de reconnaître l’erreur et de laisser aux astronomes à décider un point sur lequel ils étaient seuls juges compétens, on persista dans la fausse voie. En s’obstinant à faire intervenir la religion, et à déclarer contraire au texte des livres saints un système inattaquable, on compromit la dignité de la religion elle-même, qu’on rendait ainsi le soutien de l’erreur. Jusqu’alors il n’y avait eu que du ridicule dans cette affaire ; mais à ce moment commença une persécution odieuse qui couvrit d’ignominie la cour de Rome, et dont le souvenir devra être toujours présent à l’esprit de ceux qui prétendent enchaîner le génie et bâillonner la vérité.

Avant de procéder directement contre l’auteur du Dialogue, le pape, auquel on avait fait croire que Galilée avait voulu le rendre ridicule sous le nom de Simplicius, nomma une commission composée uniquement d’ardens péripatéticiens, qu’il chargea du soin d’examiner cette affaire. Il appela même près de lui Chiaramonti, professeur à Pise, qui avait déjà écrit contre la nouvelle philosophie. Lorsque cette démarche fut connue à Florence, elle fit une vive impression sur l’esprit de Ferdinand II, qui avait de l’affection pour Galilée. Ce prince se hâta de donner à Niccolini, son ambassadeur à Rome, l’ordre de prendre la défense de l’auteur du Dialogue, et l’on doit reconnaître que dans toute cette affaire Niccolini ne cessa pas d’agir avec zèle et intelligence en faveur du philosophe toscan. Malheureusement l’ambassadeur ne put faire autre chose que prier et supplier, car le grand-duc, à peine âgé de vingt-deux ans, manquait de force pour faire respecter son droit de protection en faveur de ses sujets, et son ministre Cioli trahissait ses intentions. Cette affaire prit bientôt un aspect défavorable. Le pape se montra très irrité contre Galilée, et le grand-duc essaya vainement de fléchir le saint-père en lui représentant combien il était cruel de sévir contre un vieillard de soixante-dix ans, dont le seul crime était d’avoir publié un ouvrage approuvé par l’inquisition. Avec une brutalité inouie, le pape exigea sans délai que Galilée, dont les médecins attestaient les souffrances, se mit en route au cœur de l’hiver, s’exposât aux atteintes de la maladie contagieuse qui sévissait alors en Toscane et aux incommodités des quarantaines, pour aller comparaître à Rome devant l’inquisition. Galilée arriva dans cette ville le 13 février 1633, et descendit chez l’ambassadeur toscan ; mais