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réclamaient l’antériorité en faveur de Galilée, qui, disaient-ils, avait fait voir à Rome ces taches à une foule de personnes. Galilée, dans cet écrit, exposait ses observations et réfutait les opinions erronées de Scheiner, qui, partant de l’axiome admis dans les écoles que le soleil était un corps dur et invariable, avait avancé que les taches étaient des astres tournant autour du soleil. La priorité de Galilée, établie sur les preuves les plus convaincantes, ne saurait être révoquée en doute ; mais lors même que ce grand astronome n’eût pas été le premier à observer ces taches, il aurait surpassé tous ses rivaux pour les conséquences importantes qu’il sut en déduire relativement à la constitution physique du soleil et au mouvement de rotation de cet astre. Galilée s’abstint de faire aucune hypothèse sur la cause inconnue jusqu’aujourd’hui de ce phénomène. Néanmoins son ouvrage sur les taches solaires est digne encore d’être consulté par les savans, et tous ceux qui veulent rechercher l’explication de ces apparences singulières doivent lire d’abord l’écrit de Galilée, qui, par des observations répétées, a su découvrir les circonstances principales de l’apparition et du mouvement de ces taches.

Galilée ne pouvait s’avancer aussi rapidement dans la voie de la vérité sans s’exposer aux plus graves dangers. Battus dans les discussions scientifiques, les péripatéticiens eurent recours aux argumens plus terribles de la religion. On a déjà vu que, depuis long-temps, Galilée avait adopté la théorie du mouvement de la terre : bien qu’il n’eût pas encore soutenu publiquement cette opinion, cependant il n’avait jamais cessé de l’inculquer à ses élèves et à ses amis. Or, tant que cette théorie était restée à l’état d’hypothèse, l’église ne crut pas devoir intervenir, et quoiqu’elle professât généralement la doctrine opposée, elle permit au cardinal de Cusa de soutenir le mouvement de la terre, et à Copernic de publier sa théorie dans un ouvrage dont le pape accepta la dédicace ; car alors le public, rejetant ces théories, s’en tenait à l’immobilité de la terre ; et comme cette ignorance universelle, qui s’efforçait de couvrir Copernic de ridicule, arrêta long-temps Galilée, l’église n’avait aucun motif sérieux d’inquiétude et dédaignait ces impuissantes tentatives. Mais enfin le philosophe toscan, comme tous les grands esprits, secouant ce joug de la multitude, sut, par son courage, par son génie, par son amour ardent de la vérité, réformer l’opinion générale, et son ascendant lui ayant acquis le concours de tous les hommes de talent, le système de Ptolémée et la philosophie d’Aristote furent menacés à la fois. Galilée se vit alors en butte à une de ces persécu-