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leur histoire, leur contrat avec le diable, leurs orgies nocturnes, sur quoi le juge rend son arrêt et les condamne à être brûlés. En 1620, on brûla à Stettin une femme de quatre-vingts ans. En vérité, ce n’était guère la peine. Mais cette femme avait toujours sous sa table deux balais verts en croix, et possédait un petit être magique qui commettait toutes sortes de mauvaises actions.

Une autre série de légendes non moins nombreuses, et plus intéressantes parce qu’elles ont un caractère local, comprend les traditions relatives aux nains et aux géans. Les nains habitent les grottes des rochers et l’intérieur des montagnes. Ils sortent souvent le soir pour danser sur la pelouse au clair de la lune, et portent un petit bonnet auquel est attachée une clochette, et des souliers de verre. Si quelqu’un peut s’emparer d’un des objets qui leur appartiennent, c’est un grand bonheur ; car ces nains possèdent d’immenses trésors, et sont doués, malgré leur petite taille, d’une force prodigieuse. Pour rentrer en possession de l’objet qu’ils auront perdu, ou qui leur aura été dérobé, il n’est sorte de dons qu’ils ne puissent faire et de sacrifices auxquels ils ne se résignent.

Les géans sont les ennemis des nains qui suppléent à leur faiblesse par la ruse et l’agilité, et souvent ne craignent pas d’attaquer leurs terribles adversaires. Cette lutte des nains et des géans que l’on retrouve dans toutes les contrées du Nord, est un symbole frappant de l’intelligence aux prises avec la matière, de l’habileté d’esprit domptant la force brutale. Ce sont les géans qui, en se battant contre leurs ennemis, ont répandu à travers les plaines ces rocs énormes que nul homme ne peut ébranler. Ce sont eux qui, en portant de la terre dans leur tablier, ont fait les presqu’îles et les promontoires qui s’avancent dans la mer Baltique. Enfin ce sont eux qui reposent sous quelques-unes de ces collines de gazon que l’on rencontre çà et là en parcourant le pays et qui ont la forme d’une tombe. Ici, comme partout, le peuple ingénieux explique par des fables les accidens de sol et les phénomènes qu’il ne comprend pas.

Les traditions de l’île de Rügen et de la Poméranie n’ont point le caractère chevaleresque et galant que l’on retrouve à chaque page dans celles du midi de l’Allemagne. Elles indiquent une population retirée à l’écart, peu influente au dehors et très superstitieuse. Celles du paganisme slave sont d’un grand intérêt, d’autres sont remarquables par leur forme naïve. Presque toutes renferment quelque trait caractéristique. Elles méritaient d’être jointes aux nombreuses légendes publiées dans les diverses provinces de l’Allemagne, et nous ne pouvons que louer le zèle avec lequel M. Temme les a cherchées et recueillies.


Versuch einer Geschichtlichen Charakteristik der Volkslieder (Essai de caractéristique historique des Chants populaires), par Mme Talvij.

Après l’histoire en prose, l’histoire en vers, car c’est une histoire aussi que ce recueil de chants populaires recueillis à différentes époques et dans