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ront à propos. Si l’Italie se persuade qu’elle sera traitée par la France comme une sœur cadette, à l’éducation de laquelle il faut pourvoir, elle s’attachera irrévocablement à la fortune de son aînée, pour qui elle deviendra une alliée sûre et utile, et fera bonne garde du côté de l’Allemagne. Autrement, on ne saurait assez le dire, si on la traite en pays conquis, l’Italie désirera toujours les Français tant qu’elle sera opprimée par les Autrichiens, et regrettera les Autrichiens quand elle aura les Français. Pendant la paix, la possession de l’Italie est sans doute chose fort agréable ; mais, au moindre bruit de guerre, c’est un très grand embarras de garder un pays prêt toujours à s’insurger en faveur des ennemis de ceux qui l’occupent. Pour que les Italiens soient parfaitement rassurés, il faudrait que les partis en France s’entendissent à cet égard, car l’Italie a besoin de pouvoir compter sur les intentions de tous ceux qui tôt ou tard seraient appelés à diriger la politique française.

Si la France a intérêt, suivant nous, à raffermir son influence en Italie, nous croyons que l’Italie est encore plus intéressée à pouvoir compter sur l’appui de la France. Il serait sans doute fort beau pour les Italiens de se passer de tout secours étranger pour opérer leur régénération ; mais cet espoir, que quelques personnes nourrissent encore, est-il fondé sur l’expérience, est-il justifié par l’étude des faits et des circonstances, par la connaissance des obstacles que l’on doit nécessairement surmonter pour parvenir à ce grand résultat ? Malheureusement non. Même en temps de paix, et seulement pour opérer les réformes les plus sages, les plus nécessaires, on rencontre une opposition de la part de l’Autriche, qui ne favorise pas dans les autres états les améliorations qu’elle adopte chez elle. Ainsi, par exemple, visant à une popularité qu’elle n’atteindra jamais, nous en sommes convaincu, il paraît qu’elle désire se réserver le monopole des amnisties. Sans une cause puissante, sans cette opposition directe ou détournée de l’Autriche, comment expliquer ce fait singulier et passablement étrange du silence que gardent tous les princes italiens après l’amnistie que le nouvel empereur d’Autriche a accordée, il y a déjà assez long-temps, aux émigrés et aux condamnés politiques lombards, amnistie que personne n’a osé imiter ? Peut-on supposer que sans un obstacle caché, et cet obstacle ne peut venir que de l’Autriche, d’autres princes italiens, dont quelques-uns ont été les amis, les complices même (qu’on nous permette ce mot qui ne saurait être pris ici en mauvaise part) des principaux émigrés, auraient pu ne pas rappeler d’anciens camarades ? Peut-on croire que, sans