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DE L’INFLUENCE FRANÇAISE EN ITALIE.

moral immense en Italie, où il avait en outre pour alliés le pape, le roi de Naples et les comtes de Savoie. Pendant le séjour que firent les papes à Avignon, les relations entre les deux pays devinrent encore plus intimes, et l’on sait combien de familles italiennes vinrent à cette époque s’établir dans le midi de la France, où la plupart occupent encore un rang élevé. Ce fut alors que le roi de France forma le projet de fonder en Italie un second royaume, qui aurait été donné à la branche d’Orléans, en obtenant du pape une cession générale de toutes les terres de l’église pour lesquelles il aurait reçu l’équivalent en France. Les pièces relatives à cette négociation peu connue existent aux Archives du royaume à côté de la correspondance déjà citée relative à Charles d’Anjou : elles montrent combien la France tenait à assurer sa suprématie en Italie. On doit bien regretter que cette négociation, qui dura plusieurs années et qui fut au moment de réussir, ait échoué ; car, une fois le pape sorti d’Italie, les princes français établis à Naples et dans le nouveau royaume qu’on voulait fonder, aidés par les républiques guelfes, auraient fini par vaincre les Gibelins et par rejeter pour toujours les Allemands au-delà des Alpes. Alors, par la force des choses, se serait peu à peu accomplie cette réunion de l’Italie que Dante et les Gibelins avaient voulu voir s’exécuter sous les auspices de l’empereur, chargé par eux d’abattre le pape.

Plus tard, il est vrai, la France, déchirée par les factions et envahie par les Anglais, dut renoncer à exercer son influence au dehors, se résigner à assister à la ruine de la maison d’Anjou à Naples, et à laisser préparer la chute des républiques sans pouvoir s’y opposer ni en profiter. Cependant, dès qu’elle fut délivrée du soin de repousser les étrangers, elle porta de nouveau son attention sur l’Italie : Naples et Milan furent envahies successivement par Charles VIII, Louis XII et François Ier. Mais les Espagnols, alliés d’un jour qui se changèrent bientôt en redoutables adversaires, surent d’abord seuls, et ensuite réunis aux Allemands, empêcher les Français de s’établir dans la péninsule. Après la bataille de Pavie, François Ier parut oublier le rôle qu’il avait voulu jouer, et, négligeant les intérêts de la France au-delà des Alpes, sembla satisfait de tirer des artistes de cette Italie pour laquelle il avait prodigué tant de sang et de trésors. C’est alors que la cour de Rome abandonna la France et se jeta dans les bras de l’empereur, et que l’on vit un pape florentin appeler des hordes barbares pour asservir sa patrie au profit de ses parens. On ne saurait s’empêcher d’éprouver encore un sentiment d’anxiété et d’admiration en voyant