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REVUE. — CHRONIQUE.

et de la ville de Jérusalem. Il est difficile de dire ce qui peut sortir de ces mouvemens : tout est encore à l’état d’embryon ; mais le germe existe et les circonstances en favorisent le développement.

Les Anglais ne paraissent pas retirer tous les avantages qu’ils se promettaient de leur coup de main sur la Chine. Le coup de main était facile ; le difficile est d’en tirer parti. L’inertie chinoise est plus redoutable qu’une armée aguerrie. Les Chinois ne se défendent guère, mais ils ne cèdent jamais qu’à moitié ; ils traitent et ne concluent pas. En attendant, les Anglais se meurent misérablement, tués qu’ils sont par les fatigues, l’insalubrité du climat et la difficulté de suffire, dans ces lointains parages, à toutes les nécessités du soldat, et du soldat anglais, qui supporte mal la disette et les privations. Si elle n’obtient pas la libre importation de l’opium, l’Angleterre aura manqué le but de ses efforts ; et quand même elle arracherait cette concession, quelle garantie aura-t-elle de l’exécution d’un traité qui aurait pour résultat l’empoisonnement d’un empire, l’abrutissement et la mort de nombreuses générations ? Qu’on vienne ensuite nous parler de l’influence que les principes du christianisme exercent sur la politique de l’Angleterre !

Une affaire très grave agite maintenant les esprits en Angleterre et aux États-Unis. Nous voulons parler du procès criminel que l’état de New-York a cru pouvoir intenter contre M. Mac-Leod, comme coupable d’avoir, le 20 décembre 1837, pris une part active à l’incendie du brick américain la Caroline, stationné à Navy-Island et appartenant à l’état de New-York. Le navire incendié fut livré au courant qui l’entraîna dans la grande chute du Niagara, ce qui fut une cause de mort pour plusieurs Américains.

Nous ne voulons pas examiner ici la question de savoir si les autorités anglaises excédaient ou non le droit de la guerre par cette expédition, si cette violation du territoire de l’Union et de la propriété américaine était une représaille suffisamment justifiée ou du moins excusable. C’est là une question internationale à débattre entre les deux gouvernemens, le gouvernement anglais et la confédération. Mais quelque sévères et difficiles que nous ayons aujourd’hui le droit d’être à l’endroit du gouvernement anglais, notre impartialité ne nous permet pas de méconnaître tout ce qu’il y a d’insolite, disons-le, d’injuste, dans les poursuites intentées contre M. Mac-Leod. Il est constant, nul ne l’a mis en doute, que M. Mac-Leod n’était qu’un agent du gouvernement anglais, qu’il ne faisait que mettre à exécution les ordres de ses supérieurs hiérarchiques, qu’il faisait la guerre comme on lui avait ordonné de la faire, que le gouvernement anglais ne l’a point désavoué. Dès-lors qui a pu imaginer de changer la question et de faire une affaire personnelle d’une affaire internationale ? Qui peut rendre M. Mac-Leod responsable des faits de son gouvernement ? Autant vaudrait soutenir que, si Turenne se fût rendu aux eaux de Bade, on aurait pu l’incarcérer et le poursuivre pour l’incendie du Palatinat.

Cette question intéresse également tous les gouvernemens. Si les agens peu-