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DE L’ALLIANCE ANGLO-FRANÇAISE.

part par lord Palmerston lui-même, de l’autre par lord Clarendon, de tous les ministres le plus favorable à la France depuis la mort de lord Holland. L’article peut donc être regardé comme l’expression fidèle de l’opinion moyenne du cabinet. Or, cet article, que dit-il ? Très nettement et je le crois très sincèrement, que le traité a eu pour but d’empêcher que l’influence en Orient se partageât entre la Russie et la France. Pendant que la Russie dominait à Constantinople, la France, patrone des chrétiens syriens et protectrice de Méhémet-Ali, prenait dans la Méditerranée une situation fâcheuse et humiliante pour l’Angleterre. Cette situation, l’Angleterre, dans l’intérêt de sa puissance aussi bien que de son commerce, ne pouvait la tolérer plus long-temps. À la vérité, quelques personnes pensent qu’on s’y est mal pris, et qu’au lieu de détruire Méhémet-Ali, il eût mieux valu prendre sa cause en main et l’enlever à la France. Mais la France avait pris les devans, et, sur ce terrain, elle eût été victorieuse. Le ministère whig a donc choisi une autre route, et l’évènement prouve qu’il ne s’est pas trompé.

Ce qu’il y a d’admirable, c’est qu’après de tels aveux l’organe du ministère whig se croit encore obligé de signaler à l’indignation publique ce qu’il appelle la politique tortueuse du 12 mai et du 1er mars. Le 12 mai et le 1er mars ne sont-ils pas bien coupables en effet de n’avoir pas apprécié tout ce qu’il y avait de bienveillant et d’amical pour la France dans la politique qu’explique si clairement la revue ? Ne sont-ils pas bien ingrats de s’être tenus en garde et mis à l’écart plutôt que de reconnaître par une prompte et franche adhésion de si excellens procédés ? M. Macaulay, lord Palmerston et lord Clarendon, qui ne disent pas un mot des tentatives insurrectionnelles encouragées et soldées par l’Angleterre, avant le traité et au mépris de la note collective du 27 juillet, reviennent d’ailleurs, avec une vertueuse colère, sur le fameux arrangement direct, et montrent combien il était odieux de chercher à mettre d’accord le pacha et le sultan, au lieu de les brouiller. Après une action si noire, la France n’avait plus rien à attendre, et lord Palmerston pouvait sans scrupule cacher le traité bien plus long-temps qu’il ne l’a fait à M. Guizot et à M. Thiers. Quant à la réponse de lord Palmerston à la note du 8 octobre, réponse qui, on le sait, ne fut rédigée qu’après la formation du nouveau cabinet, elle était absolument nécessaire ; sans cette note, la France eût pu croire qu’on lui reconnaissait le droit de prendre l’établissement égyptien sous sa protection, et de protester contre la déchéance de Méhémet-Ali. Que cette dé-