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enseigne la vraie foi et la loi de Dieu. Il lui dit la vie de Jésus depuis sa naissance jusqu’à sa mort.

« La jeune fille dévoua son ame à Dieu ; elle avait un grand désir de voir Jésus son bien-aimé, et elle l’attendit long-temps. Mais quand elle fut près de mourir, Jésus lui apparut.

« Il la prit doucement par la main et l’emmena dans son beau royaume. Là elle est devenue reine, elle goûte toutes les jouissances que son cœur peut désirer, et des milliers d’années passent pour elle comme un jour. »


On pourrait faire remonter très haut l’origine de ce chant religieux ; celui que nous venons de citer, tel qu’il existe aujourd’hui dans divers recueils hollandais[1], n’est probablement qu’une amplification assez récente d’un chant très simple et sans doute beaucoup plus court du XVe siècle. Il en est de même d’un grand nombre d’autres pièces, dont il faut reporter au XVe siècle, et quelquefois plus haut, l’invention et la composition première. L’original s’est perdu, et nous ne les connaissons que par des imitations disséminées de distance en distance au XVIe ou XVIIe siècle ; mais il nous a paru plus convenable de les ramener toutes à leur point de départ, pour les resserrer en un même faisceau.

Après la série des chants religieux vient celle des chants profanes, chants de guerre et d’amour, romances et ballades. La même naïveté poétique, la même effusion de cœur que l’on admire dans la première, se retrouvent dans celle-ci, mais quelquefois avec plus de chaleur. Les sujets de ces chants sont très variés ; c’est tantôt une tradition populaire qui présente toutes les péripéties du drame comme celle du Comte Floris, tantôt un chant national comme celui de Guillaume de Nassau, tantôt un conte de géant comme dans le Chasseur de la Grèce. Les scènes d’amour surtout reviennent à tout instant ; l’amour occupe une grande place dans ces fraîches et chastes imaginations. Elles nous l’ont peint sous toutes les formes, avec la couronne de myrte sur la tête ou la branche de cyprès à la main, avec le sourire sur les lèvres ou les larmes dans les yeux, mais toujours tendre, religieux, dévoué. Ses chants de joie viennent du fond de l’ame, ses mots d’adieu font pleurer. Un chevalier revient d’une contrée lointaine ; il aperçoit la tour de son château ; il se hâte, car il est impatient de revoir sa jeune femme. Il rencontre en chemin un autre chevalier, qui lui dit : « Ta femme est infidèle ; tiens, regarde cet anneau que je porte au doigt. Ne le reconnais-tu pas pour le

  1. Lejeune, Neederlandsche Voikszangen. — De Nieuwe Oost-indische Roozeboom (Horæ belgicæ).