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LA HOLLANDE.

écrite, que l’on divise encore en deux dialectes, le hollandais et le flamand. Le hollandais est resté plus près de la source, le flamand a été altéré par l’influence de la France. Ces deux dialectes ne diffèrent cependant entre eux que par certaines locutions et par des terminaisons de mots ; leurs racines sont restées les mêmes, leur syntaxe est aussi la même, et qui comprend l’un comprend sans difficulté l’autre. Les nuances légères qui les séparent sont du reste assez récentes ; au moyen-âge, elles n’existaient pas encore. Les œuvres écrites à cette époque à Gand ou à Amsterdam sont rangées dans la même catégorie. Maerlandt, né en Flandre, et Melis-Stoke, né en Hollande, sont inscrits l’un comme l’autre dans les rangs d’une littérature que nous ne connaissons que sous le nom de littérature hollandaise.

Cette littérature a beaucoup imité et peu inventé. Placée entre le génie de deux grands peuples qui devaient nécessairement la dominer, trop faible pour se développer et s’affermir d’elle-même, pour surmonter les circonstances qui pouvaient arrêter ses progrès, elle a été tour à tour sous l’influence de la France et de l’Allemagne, plus souvent cependant sous celle de la France, et par contre-coup sous celle de l’Espagne et de l’Italie, comme un habile écrivain l’a tout récemment démontré[1].

Dès ses premières tentatives, et pour ainsi dire à son point de départ même, la littérature hollandaise fut entravée par le morcellement des Pays-Bas, par leur division en comtés et en petites principautés, chacun de ces petits états s’isolant des autres et se formant un dialecte et une littérature à part. En 1383, les diverses provinces furent réunies sous une même domination ; mais cette domination était celle des ducs de Bourgogne. Ce fut pour la littérature de Hollande un malheur plus grand encore. L’élément germanique, l’esprit national de cette littérature fut alors violemment comprimé par l’autorité française. La langue du souverain devint en peu de temps celle des principaux fonctionnaires et des classes élevées. C’était dans cette langue que le prince rendait ses arrêts et que toutes les affaires importantes du pays étaient traitées. Du domaine de la politique, elle passa peu à peu dans les habitudes de la vie privée, et la langue hollandaise, vaincue et refoulée par cette puissante rivale, ne trouva de refuge qu’au sein du peuple et des classes intermédiaires.

Quand Maximilien Ier devint maître des Pays-Bas par son mariage avec Marie de Bourgogne, il essaya vainement de rendre quelque

  1. Declercq, Verhandeling ter beantworting der vraag welken invloed, etc., 2e édit., Amsterdam, 1826