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chrétienté. Il s’agit seulement d’organiser un protectorat qui garantisse également la sécurité et les droits de tous les habitans de la ville sainte, sans qu’aucune puissance européenne puisse s’en arroger la souveraineté.


Analyse de l’Histoire romaine, par M. Arbanère[1] — « Ô vérité ! as-tu fui dans les cieux avec Astrée après l’âge d’or ! Daigne descendre, fais entendre ta voix, et épargne ainsi à notre entendement cette longue fatigue de chercher à concilier des masses d’opinions toutes contradictoires ! » Cette invocation épique, à l’occasion des systèmes de Micali et de Niebuhr sur les origines de Rome, fera mieux connaître l’ouvrage de M. Arbanère que tous les développemens auxquels nous pourrions nous livrer. Elle peint merveilleusement le besoin du vrai, la candeur scientifique, le respect pour la phrase traditionnelle, l’horreur du mot propre, la dévotion sincère aux divinités de l’Olympe, et le classique cortége des vertus littéraires qui ramènent le lecteur à l’âge d’or de la république des lettres.

M. Arbanère a publié précédemment une Analyse de l’histoire asiatique et de l’histoire grecque, qui, sur le rapport d’une commission formée dans le sein de l’institut, fut jugée digne des honneurs de l’Imprimerie royale. La publication que nous annonçons aujourd’hui reproduit le plan du premier travail, avec des proportions beaucoup plus larges. M. Arbanère ne s’est pas appliqué à suivre l’ordre des temps ; il ne s’est pas mis en frais de composition et de coloris pour promener le lecteur indolent dans une galerie de tableaux ; il a voulu parler à l’intelligence plutôt qu’à l’imagination, et, pour être plus utile, il s’est résigné à être moins attrayant. Son procédé rappelle, un peu trop peut-être, celui des anatomistes qui commencent par désorganiser la machine humaine pour étudier isolément chacun des organes qui la composent. Ainsi, M. Arbanère a disloqué le corps de l’histoire romaine pour en opérer la dissection plus à son aise ; il a mis à nu les fibres nationales et les a observées une à une. Gouvernement, religion, système militaire, relations politiques, sciences et arts, littérature, esprit public, vie privée, institutions impériales, réforme par le christianisme, tels sont les titres sous lesquels vont se ranger méthodiquement les faits consignés par les annalistes romains. On s’étonne seulement que l’auteur n’ait pas ménagé dans son plan une section particulière pour la législation civile. La loi des douze tables n’obtient que quelques lignes insignifiantes ; les autres lois mentionnées dans le courant du livre sont seulement celles qui se rapportent au droit public. C’est une lacune impardonnable dans une analyse présentée comme une restauration complète de la société romaine. L’exposition des lois civiles est toujours le meilleur commentaire de l’histoire politique. Quand on connaît la condition légale des dif-

  1. Quatre vol. in-8o, chez Firmin Didot.