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doit être, non un agrandissement territorial, mais le maintien des relations commerciales, et il serait à craindre qu’une fois le drapeau britannique planté sur un territoire enlevé au céleste empire, des circonstances ne vinssent forcer les Anglais à reculer les limites de ce territoire, et commencer ainsi en Chine la répétition de ce qui s’est passé dans l’Inde anglaise. Rien ne serait plus aisé que de précipiter cet empire dans la confusion et l’anarchie, car il y règne beaucoup de mécontentement, et la dynastie actuelle n’est rien moins que solidement assise sur le trône. Il suffira de donner au gouvernement chinois une leçon sévère. M. Lindsay opine pour qu’on fasse sauter tous les forts à l’embouchure de la rivière de Canton, ce qui sera l’ouvrage d’un jour pour une escadre anglaise telle que celle qui, probablement, est dans les mers de Chine au moment où nous écrivons. Un grand point, selon M. Lindsay, serait de s’emparer du commissaire Lin, qui réside fréquemment au Bogue, ou de tout autre mandarin de haut rang, qui servirait merveilleusement pour nouer des négociations utiles avec l’empereur. Après avoir fait preuve de force, on serait libre de montrer une modération et une réserve qui ne pourraient plus être attribuées à la crainte. Si le gouvernement impérial n’était pas suffisamment humilié pour souscrire aux demandes des Anglais, il faudrait recourir à un blocus de la côte, blocus qui comprendrait les ports de Canton, d’Amoy, de Ningpo et de Shanghae.

Voilà le plan de M. Lindsay. Il a au moins le mérite d’être exposé avec franchise et d’indiquer d’honnêtes convictions. L’opinion de cet ancien fonctionnaire n’est certes pas favorable au caractère du gouvernement chinois ; en revanche, il pense beaucoup plus de bien des Chinois en général, qu’on n’aurait pu s’y attendre. M. Lindsay termine son exposé par les considérations et les détails suivans, qu’il nous a paru intéressant de reproduire :


« Mon but, en présentant cette brochure au public, a été de prouver que, dans les hostilités pendantes, la justice était de notre côté. Je ne suis point mu par des motifs de vengeance ou d’animosité contre les Chinois ; loin de là : je trouve que le gouvernement a toujours été injuste et oppressif à l’égard des étrangers, mais j’aime la nation, et je suis convaincu que, sous un système tel que celui que j’espère voir bientôt en vigueur, les relations les plus amicales pourraient exister entre eux et nous. J’ai connu intimement beaucoup de Chinois dans l’intégrité et l’honneur desquels je placerais une confiance aussi entière que dans ceux d’aucun de mes compatriotes. La conduite jalouse du gouvernement s’est opposée jusqu’à ce jour à l’extension des relations sociales ;