Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 22.djvu/550

Cette page a été validée par deux contributeurs.
546
REVUE DES DEUX MONDES.

astres ou par la connaissance des plantes, un supplément au traitement qu’ils reçoivent de l’état[1]. On se ferait difficilement une idée de la manière dont on en use avec les professeurs de la Faculté des sciences de Paris. Pour ne citer qu’un seul fait, je vous dirai, monsieur, que dans les épreuves du doctorat les examinateurs, qui ont passé quelquefois plusieurs jours à lire et à corriger une thèse avant qu’elle puisse être imprimée, reçoivent, après un examen qui dure une heure, cinquante sous ! Vainement des professeurs ont-ils demandé à plusieurs reprises que ces épreuves fussent gratuites : le règlement veut qu’ils soient rétribués, et on les force à signer plusieurs états pour toucher cette belle somme. L’institut même, dont tout le monde parle, n’est guère mieux traité, et peu de personnes savent quel est le sort des membres des différentes académies. À l’étranger on imprime qu’ils reçoivent dix ou douze mille francs par an, et en France même on peut lire, dans des journaux qui devraient être bien informés, que le traitement des académiciens est fort élevé. Le fait est qu’à l’Académie des Sciences, où la plupart des membres sont constamment occupés à préparer des rapports pour le gouvernement et pour des particuliers, ou à juger les travaux envoyés au concours, ils reçoivent douze cents francs de traitement fixe, plus trois cents francs de droits de présence, s’ils sont assidus aux séances. Ne vaudrait-il pas beaucoup mieux monsieur, que des fonctions si élevées, que les premières places scientifiques de la France fussent entièrement gratuites, plutôt que d’y attacher un traitement à peine égal à celui d’un garçon de bureau ? À l’Académie de Pétersbourg, les membres titulaires reçoivent douze mille francs par an, et ils peuvent ainsi consacrer tout leur temps à la culture des sciences, sans chercher à remplir d’autres fonctions ; mais les membres de l’Institut de France, s’ils n’ont pas de fortune ou s’ils n’exercent pas une profession libérale, sont forcés, pour se créer une existence honnête et conforme à la position sociale qu’ils occupent, d’accepter plu-

  1. Au reste, ce ne sont pas les professeurs de la Faculté des Sciences qui sont le moins rétribués, c’est à l’École des Beaux-Arts que les traitemens sont les plus infimes. Les amateurs qui achètent quelquefois à des prix excessifs un croquis fait par un artiste à la mode, seraient bien étonnés d’apprendre qu’ils ont payé une esquisse qui a pu coûter à l’auteur quelques heures de travail, plus cher que l’état ne paie en cours public. Les professeurs de l’École des Beaux-Arts, parmi lesquels figurent MM. Huyot, David, Rawey, Pradier, Ingres, Vernet, Delaroche, etc., reçoivent cent louis par an.