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LES MISSISSIPIENS.

Mon mari m’avait fait cadeau de quelques-unes de ces actions pour ma toilette, je vous les ai sacrifiées ; à présent je n’ai plus rien, adressez-vous à lui. Tenez, le voici !

(Samuel Bourset s’approche, suivi du duc et de plusieurs gentilshommes.)
TOUTES LES DAMES, s’élançant vers lui.

Ah ! M. de Puymonfort !… (Elles lui parlent toutes à la fois.)

BOURSET.

Pardon ! mille pardons, mesdames ! Je suis désolé, mais je ne puis pas vous entendre toutes à la fois. (Aux autres personnages.) Je ne puis absolument plus rien pour vous, messieurs. J’ai renoncé à tous mes bénéfices dans cette affaire pour vous être agréable. Si vous voulez vous adresser à M. Law, peut-être sera-t-il plus heureux. Je viens de voir passer sa voiture.

TOUS ENSEMBLE.

Ah ! M. Law !

JULIE.

Je vais le recevoir. (Elle s’éloigne, tout le monde la suit, excepté le duc et Samuel Bourset.)

LE DUC.

Vous n’allez pas au-devant du contrôleur-général ?

BOURSET.

Il n’arrivera que dans deux heures ; c’est moi qui ai imaginé cet expédient pour me délivrer de leurs importunités.

LE DUC.

Ah ! quelle rage les possède ! Savez-vous, mon cher comte…

BOURSET.

Ah ! monsieur le duc, de grâce, appelez-moi Bourset dans l’intimité. Si j’ai acquis un titre, c’est, vous le savez, par amour pour Julie, afin qu’elle n’eût pas à rougir de notre union ; mais, au fond, moi, je ne rougis pas de mon nom, je l’ai porté quarante ans avec honneur.

LE DUC.

Aussi vous a-t-il porté bonheur de son côté, mon cher Bourset !

BOURSET.

Et j’espère qu’il m’en portera encore plus par la suite. Cette affaire de la Louisiane s’annonce sous des auspices magnifiques.

LE DUC.

Êtes-vous bien sûr de celle-là ?

BOURSET.

J’y ai mis tout ce que je possède.

LE DUC.

En vérité ?

BOURSET.

Et j’y aurais mis la France tout entière, si elle m’eût appartenu.