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LA SICILE.

de construction abondent dans le royaume de Naples ; mais ils sont poreux, se crevassent, et demandent beaucoup de soins, et sur tous les navires construits en bois indigène, où la mâture seule vient de Venise ou de Riga, les Siciliens conviennent mieux pour composer les équipages que les Napolitains. Le gouvernement napolitain, qui paraît vouloir donner des soins à sa marine, diminuera encore les fermens de troubles de la Sicile en employant cette population maritime, si négligée depuis vingt ans. Des routes, des fabriques, les travaux des mines, des encouragemens à l’agriculture, voilà ce qui achèvera de calmer la Sicile, et dès-lors elle ne sera plus un sujet d’inquiétude pour l’Europe. Quant à l’Angleterre, elle n’a pas laissé des souvenirs bien ardens dans la population sicilienne ; à Palerme, à Messine, on ne se souvient guère plus de sir William Bentinck que de l’amiral Vivonne. Dans cette dernière ville, où ils ont résidé long-temps ; les Anglais ont créé une petite route de Messine au phare, route qui leur était nécessaire pour le transport de leurs approvisionnemens. C’est le seul monument qui soit resté de leur séjour en Sicile. Les sympathies sont donc à peu près nulles en Sicile pour l’Angleterre comme pour la France. Il est vrai que depuis l’occupation d’Alger et la destruction de la piraterie qui nuisait à la petite navigation sicilienne, et particulièrement à la pêche des coraux près des côtes d’Afrique, le nom français est prononcé avec quelque respect par les populations maritimes de la Sicile, surtout dans la partie méridionale de l’île ; mais c’est là tout. S’il y a un parti en Sicile, c’est celui de l’indépendance, qui repousse le concours de toutes les nations. Ce parti se trouve donc isolé, c’est-à-dire faible par son principe même, et il dépend du gouvernement des Deux-Siciles de l’affaiblir et de l’isoler encore plus, en travaillant activement à améliorer le sort des Siciliens. Je termine sur cette vérité, monsieur, et je remets à un autre jour le plaisir que j’aurais à vous parler de la triste beauté des villes de Catane et de Syracuse, mais le soufre m’a entraîné trop loin.

Je suis, etc.


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