Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 22.djvu/249

Cette page a été validée par deux contributeurs.
245
LE TEXAS ET SA RÉVOLUTION.

Les choses demeurèrent en cet état jusqu’à la réunion du premier congrès constitutionnel de la république, qui s’ouvrit le 3 octobre, à Columbia sur le Brazos[1] ; mais déjà les citoyens avaient procédé à l’élection du président, et s’étaient prononcés en même temps sur la grande question de l’incorporation du Texas aux États-Unis. Les deux concurrens pour la présidence furent Stephen Austin et Samuel Houston. Le nom du fondateur de la nationalité texienne semblait avoir perdu tout son prestige, et le vainqueur de San-Jacinto fut appelé à la présidence par trois mille cinq cents quatre vingt-cinq suffrages, tandis que Stephen Austin ne lui en opposa que cinq cent cinquante-un ; trois mille votes à peu près se portèrent sur Mirabeau Lamar pour la vice-présidence. L’incorporation du Texas aux États-Unis fut sollicitée par le chiffre bien significatif de trois mille deux cent soixante-dix-sept. En prenant possession de la présidence au sein du congrès, Houston, dont le caractère ne manque pas d’une certaine grandeur, eut un beau moment quand il déposa son épée. L’émotion l’empêcha de continuer son discours, et l’assemblée tout entière partagea le sentiment qui l’oppressait.

Samuel Houston était alors le héros du Texas, la personnification glorieuse de sa lutte contre le Mexique ; bientôt cette popularité s’évanouit. Ses différends avec le congrès pour la disposition des terres nationales et pour l’organisation de la milice, son peu de goût et son peu d’aptitude pour les affaires, ses habitudes de soldat, ses mœurs sans dignité, firent oublier ses anciens services. Le congrès avait manifesté dans un rapport remarquable[2] la plus

  1. La ville d’Houston ne devint qu’en 1837 le siége du congrès et du gouvernement. Elle fut ballotée dans le congrès contre plusieurs autres localités, et ne passa qu’au quatrième tour de scrutin, à vingt-une voix. On peut juger de ce qu’était alors le Capitole, ou palais de la représentation nationale, par la résolution suivante, qui fut adoptée à l’unanimité, et que j’ai relevée sur le journal de la chambre des représentans : « Résolu qu’il sera prescrit au concierge de faire enlever le plafond de la salle, comme mal exécuté et fort peu sûr. » (Resolved that the door keeper be instructed to have the plastering over head, in the hall, all taken off, believing in to be bad work, and unsafe to sit under.)

    Cette même assemblée prit une autre résolution pour autoriser le gouvernement à faire l’acquisition d’une collection des lois de l’état de Cohahuila et Texas, qui appartenait à un sieur Caravahal.

  2. Les dernières pages de ce rapport contiennent, sur le caractère, la vie politique et la moralité de Santa-Anna, des observations très sévères, et malheureusement très justes. Jamais peut-être le chef légal d’un gouvernement étranger n’a été l’objet d’une pareille critique, dans un document public, émané d’un autre gouvernement.