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LE TEXAS ET SA RÉVOLUTION.

et il cherchait par tous les moyens à populariser dans la nation et dans l’armée le changement constitutionnel qu’il méditait. C’était pour en faciliter l’accomplissement qu’il avait expulsé le dernier congrès, et on n’ignorait plus ses desseins quand la nouvelle législature de Cohahuila se réunit en 1835. Malheureusement un des premiers actes de cette assemblée la mit aussitôt en collision avec le gouvernement suprême, qui était bien plus porté à étendre son propre pouvoir qu’à le laisser méconnaître par les états. La province ayant besoin d’argent, le gouverneur proposa une loi pour la vente de quatre cents onze lieues carrées de terre dans le Texas. Les spéculateurs qui devaient conclure l’affaire se trouvaient à Monclova ; ils étaient tous Texiens, et par cela seul assez suspects. Aussi, dès que la chose fut connue à Mexico, le gouvernement et le congrès résolurent-ils de s’opposer à la conclusion du marché. Ils contestèrent à l’état de Cohahuila le droit d’aliéner le domaine public, en se fondant sur ce qu’il devait au trésor de Mexico un arriéré considérable ; et le congrès autorisa le pouvoir exécutif à se faire céder les terrains en question, pour en déduire la valeur sur le montant de la dette de Cohahuila. Il est évident que le gouvernement de Mexico, toujours en défiance des Texiens, combattait cette opération dans la seule crainte d’une émigration nouvelle de colons anglo-américains, sur les terrains acquis par des spéculateurs qui devaient immédiatement les revendre en détail à New-York ou ailleurs ; mais la proposition du congrès ne faisait pas le compte de l’état de Cohahuila, qui voulait de l’argent pour son administration intérieure, et se souciait peu de payer ses dettes à la république. Aussi se mit-il en devoir de résister ; sur quoi le général Cos, commandant supérieur des provinces orientales du Mexique, reçut de Santa-Anna l’ordre de marcher avec ses troupes sur la capitale de l’état, et d’expulser la législature rebelle. Le gouverneur et plusieurs membres de l’assemblée furent jetés en prison. Les spéculateurs texiens, dont la conduite n’était pas irréprochable dans toute cette affaire, se hâtèrent de retourner chez eux, et proclamèrent aussitôt la guerre, la séparation et l’indépendance.

Ce fut dans les plaines de San-Jacinto que le parti de la guerre, fortifié par les derniers évènemens, leva son étendard le 16 août 1835. Huit mois après, la cause du Texas devait y remporter sa victoire définitive. De là, le premier effort des insurgés se porta sur Anahuac, où ils abolirent je ne sais quels règlemens de douanes odieux à la population. Cependant il n’y avait pas unanimité parmi les habitans pour engager la lutte. Le parti de la paix, qui était assez nombreux,