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qu’à voir l’air grave et morne de ses habitans, on dirait préparée à la catastrophe par laquelle l’Etna la détruira infailliblement à son tour.

La rue Etnéenne traverse dans son cours cinq grandes places. La première, celle du Dôme, est couverte de superbes palais et d’églises plus belles encore. Le dôme ou la basilique s’y présente d’abord avec son portail peuplé de statues de marbre. Une galerie de marbre d’un beau travail, ouvrage du sculpteur catanais Gaetano Puglisi, entoure cette église, et un magnifique pavé de marbre s’étale comme un riche tapis devant ses portes extérieures. Cette cathédrale de Catane est bâtie sur les ruines d’un ancien temple de Bacchus et sur celles de thermes antiques qu’un reste d’inscription désigne sous le nom d’Achilléens[1]. Les thermes, comme la plupart de ces établissemens chez les anciens, étaient divisés en sept parties, dont on retrouve les vestiges sous l’église actuelle. On peut encore pénétrer, par la galerie de communication, dans une salle dont la voûte, autrefois décorée de stuc, est soutenue par quatre piliers, et où se trouvaient, dans la partie tournée vers le sud-ouest, huit fenêtres destinées à la ventilation. Cette salle était ce qu’on nommait la tribune ou le calidario ; on y enterre les chanoines. Les autres salles sont abandonnées ou n’ont pas encore été déblayées, et les chapiteaux ainsi que les colonnes de marbre qui s’y trouvaient ont servi à orner la cathédrale. Les antiquaires de Catane montrent toutefois sans hésitation les lieux où se trouvaient l’apoditerio, dans lequel on se dépouillait de ses vêtemens, l’efebeo, où l’on se livrait aux exercices gymnastiques, le coriceo, où l’on jouait à la paume pour se remettre en vigueur, le conisterio, où l’on conservait la poudre dont on se couvrait quand on était en sueur, le tepidario, où l’on se reposait avant d’entrer dans le bain, l’eleuterio, où se conservaient l’huile et les parfums, et même la sedia stercoreia, qui en est proche, tant est grande leur ardeur de la science et de l’antiquité. Des conduits souterrains, placés dans la partie nord-est de ces thermes, conduisaient les eaux à la mer.

La fondation de l’évêché de Catane est due au grand comte Roger, qui en institua plusieurs autres en Sicile. Son diplôme existe encore. Après avoir mis fin à la domination des Sarrazins et se trouvant maître des domaines qui leur avaient appartenu, il en concéda une part à l’église et lui accorda, en outre, une dîme levée sur les taxes royales. À la mort de Bécumène et de Hugo di Braccio, seigneur de Catane,

  1. Rechies discit thermarum achillarium curatores.