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SANTA-ROSA.


12 février 1823.

« … Je ne pense pas du tout au Portugal ni à l’Espagne, où Collegno est allé. Mes principes politiques ne m’y appellent nullement.

« Tu me dis des douceurs, et je t’en remercie ; je les aime beaucoup. Il y a juste un an que nous étions ensemble à Auteuil. Quelle douce vie j’y menais l Seulement, si je ne t’avais pas vu souffrir. Mais peut-être ce que tu m’as coûté de douleurs sous ce rapport augmente-t-il mon sentiment pour toi. Il ne finira qu’avec mon existence, et j’espère avec Socrate qu’elle ne finira pas de bien long-temps. »


14 avril 1823.

« Il faut que je te gronde de ne m’avoir pas encore envoyé le premier volume de Platon. Je l’ai vu chez Bossange. Peu s’en est fallu que je n’aie délié ma bourse, quoique si mince, et que je n’aie payé au libraire 10 à 12 shellings pour emporter le livre dans ma poche et le dévorer à mon aise. Ce me semblait une espèce d’affront que de ne pas avoir en ma possession ce cher volume, dont j’ai vu naître et croître la meilleure part. J’y ai un droit réel.

« J’espère bientôt aller à la campagne. Impossibilité absolue pour moi de travailler à Londres. Des visites à faire, à rendre, à recevoir ; plusieurs dîners par semaine ; la moitié du jour dans les rues de Londres, qui ne finissent point ; beaucoup de soirées à table à voir défiler des bouteilles auxquelles je ne touche pas ; bref, je ne fais que lire un peu, prendre des notes, et je ne travaille point. Mais je te jure que je ne continuerai pas cette sorte de vie, et que je m’ensevelirai plutôt dans un coin du pays de Galles.

« J’ai reçu et lu avec infiniment de plaisir la traduction de Manzoni par Fauriel ; elle est exquise. L’écrit de Manzoni sur les unités m’a paru parfait et m’a quasi converti. Adelchi me plaît moins que Carmagnola, dont le mérite croît à mes yeux toutes les fois que je le relis ; mais les chœurs d’Adelchi sont d’une beauté ravissante.

« On vient d’imprimer à Barcelone une déclaration au nom du corps italien, mais sans signature, où je suis accusé avec une insigne mauvaise foi de n’avoir pas voulu prendre part à cette expédition par des raisons indignes de moi. Je ne crois pas devoir répondre à un écrit anonyme. Conviens que c’est fort triste. Je ne manque-