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révolution du mois de décembre précédent, qui avait exclu de la présidence Gomez Pedraza. Le parti démocratique, au sein duquel il existait de grandes divisions, prenait au sérieux sa couleur libérale, et menaçait indirectement l’union anglo-américaine par le contrecoup de sa politique abolitionniste. Dans l’une et dans l’autre faction, le sentiment national se révolta instinctivement contre les prétentions du cabinet de Washington sur le Texas, et il est permis de croire que l’influence anglaise ne fut pas étrangère à cette manifestation universelle d’hostilité contre les États-Unis. Bientôt le vainqueur des Espagnols, Santa-Anna, qui était l’idole du jour, exigea la destitution de Zavala, son ennemi, de Zavala, qui est mort citoyen du Texas, et il demanda en même temps le renvoi de M. Poinsett. L’opinion publique fut encore animée contre les États-Unis par la publication d’une correspondance du général Bravo avec M. Bustamente, sur ce qu’on avait à craindre de leur ambition. Les commentaires offensans sur le caractère mexicain, que les journaux du sud et de l’ouest de l’Union, partisans de l’acquisition du Texas, joignirent à leurs articles sur ce sujet, dans les derniers mois de 1829, ne purent qu’exaspérer davantage, et ce sentiment général fit explosion, d’une manière pour ainsi dire officielle, dans un mémoire présenté au congrès mexicain par le secrétaire d’état, à la fin de cette même année. Je citerai ici un extrait de ce document, parce qu’il jette un grand jour sur l’histoire morale de la lutte soutenue pendant quelques années entre la race espagnole du Mexique et la race anglo-américaine pour la possession du Texas.

« Les Américains du Nord, dit le secrétaire d’état mexicain, commencent par s’introduire dans le pays qu’ils convoitent, sous prétexte d’opérations commerciales ou de colonisation, avec ou sans l’autorisation du gouvernement auquel il appartient. Ces colonies grandissent, se multiplient, deviennent bientôt l’élément principal de la population ; et aussitôt ce fondement posé, les Américains du Nord commencent à élever des prétentions qu’il est impossible d’admettre, qui ne soutiennent pas une discussion sérieuse, et qui sont basées, par exemple, sur des faits historiques contestés par tout le monde, comme les voyages de Lasalle, dont la fausseté est maintenant reconnue, mais qu’ils n’en invoquent pas moins à l’appui de leurs prétendus droits sur le Texas. Ces opinions extravagantes sont d’abord présentées au monde par des écrivains inconnus, et le travail que d’autres s’imposent pour chercher des preuves et pour établir leurs argumens, ceux-là l’évitent au moyen d’assertions hardies qui, au