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DE LA POLITIQUE ROMAINE.

fait, l’autre de droit[1]. « Ainsi, ajoute-t-il, nous regardons comme notre patrie et le lieu qui nous a vus naître et celui qui nous a adoptés ; mais celle-là a des droits plus puissants à notre affection, qui, sous le nom de république, forme la grande patrie ; c’est pour elle que nous devons mourir… Je ne renierai jamais Arpinum pour ma patrie ; mais Rome sera toujours la première et la plus grande ; car elle contient l’autre. »

Rome ne se borna pas à classer ses citoyens d’adoption, elle prit soin de coordonner, avec non moins de régularité, autour d’elle le vaste corps des nations latines et italiennes qui, l’une après l’autre, vinrent tomber sous sa domination.

Le premier rang parmi les alliés appartenait aux peuples de la confédération latine[2] ; leurs traités avec la république continrent généralement des conditions plus favorables que n’en obtenaient les autres peuples de l’Italie. Ainsi ils conservèrent leur territoire, leurs lois, leurs alliances, sous le contrôle de Rome ; ils furent rangés, quant aux tributs, sur le pied d’égalité à peu près complète avec les citoyens romains ; on leur imposa seulement un contingent de soldats qu’ils devaient payer et nourrir. Ils purent acquérir le droit de cité romaine par l’exercice d’une magistrature annuelle dans leur pays, par la translation de leur domicile à Rome, pourvu qu’ils laissassent des enfans dans leur ville, par une accusation publique de concussion contre un magistrat romain, s’ils parvenaient à le faire condamner ; ils jouissaient, quant à la propriété, d’une portion du privilége romain. D’ailleurs, ils n’avaient ni le droit de mariage romain, ni la puissance paternelle romaine sur leurs enfans, ni la capacité de tester en faveur d’un citoyen romain, ni celle d’hériter de lui, ni l’inviolabilité de leur personne. Leur condition était bien meilleure que celle des autres sujets de la république ; elle était inférieure à celle du citoyen ; elle se résumait en une aptitude à acquérir facilement la plénitude de ce titre, et déjà en une participation limitée à ses capacités.

Ce corps de priviléges particuliers aux peuples latins et émanant des traités obtenus par eux, devint avec le temps, sous le nom de droit du Latium ou de Latinité[3], un droit concessible que des in-

  1. Cicer., de Leg., II, 2.
  2. Socii, Socii latini, Socii nominis latini. — Cf. Dionys., Ant., VI, 95. — Tit.-Liv., II, 22. — Cicer., Pro Balb., 21, 23.
  3. Jus Latii, jus Latinitatis. — Tit.-Liv., VIII, 14 ; IX, 43 ; XXV, 3 ; XXXVIII, 36, 44 ; XLI, 8. — Cicer., Pro Sext., 13 ; Pro Balb., 13 ; Brut., 6, etc.