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LA NOUVELLE-ZÉLANDE.

presque uniquement pour eux. C’est l’idéal du pouvoir théocratique. À la Nouvelle-Zélande, au contraire, les missions ont été, pendant vingt années, plutôt souffertes que reconnues. Quelques esclaves formaient le noyau de cette petite église ; les chefs, les nobles échappaient à son action et y échappent encore. Les grands guerriers du pays se contentaient de la couvrir d’une protection dédaigneuse, déguisant mal leur pitié pour des hommes qui ne faisaient pas leur chemin par les armes. Si aujourd’hui, grace aux bras européens et à la merveilleuse fécondité du territoire, les établissemens des missionnaires ont acquis, dans le nord de la Nouvelle-Zélande, une valeur considérable, le succès semble avoir porté plutôt sur le sol que sur les ames, plutôt sur les castes subalternes que sur la classe supérieure. L’esprit indigène n’a pas encore abdiqué ici comme il l’a fait dans les groupes situés entre les tropiques. La trempe était plus forte ; elle a mieux résisté.

Telle est, dans un aperçu sommaire, la physionomie de la famille polynésienne. On a pu voir par quels points ses diverses branches se touchent et par quelles nuances elles se séparent. C’est la même race, éprouvée par des modifications de climats. Avant d’appeler l’attention sur les tribus zélandaises, il était utile de constater rapidement leur filiation. Nous allons maintenant passer à leur histoire.

IIPREMIERS VOYAGES À LA NOUVELLE-ZÉLANDE.

Tasman, ce hardi navigateur du XVIIe siècle, découvrit le premier, en 1642, et nomma la Nouvelle-Zélande. Entré dans le vaste détroit qui sépare les deux grandes îles, et qu’il prit pour un golfe profond, il jeta l’ancre près du rivage et envoya ses canots vers une aiguade voisine. Pendant cette opération, des pirogues survinrent, chargées de naturels armés de lances et couverts de nattes pour tout vêtement. On les invita à monter à bord du Zeehan ; ils s’y refusèrent, méditant une surprise. En effet, peu de minutes après, l’un des canots hollandais fut abordé de vive force et perdit quatre hommes dans cette attaque. Il fallut, pour se débarrasser des agresseurs, faire jouer l’artillerie. Tasman quitta ces parages inhospitaliers, qu’il nomma Moordenaar’s-Bay (baie des Meurtriers), et, après avoir côtoyé l’île septentrionale, il doubla le cap Nord et cingla vers l’Europe, laissant dans la mémoire des indigènes quelques souvenirs confus de son apparition.