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Par quelles qualités l’ibis méritait-il d’être l’objet d’une telle vénération, c’est ce qu’ont pris soin de nous dire quelques écrivains, dont je n’entreprendrai pas de reproduire ici les raisons, parce que je crains de ne les avoir pas bien comprises. Je dois dire cependant que l’oiseau était duement reconnu pour l’inventeur des clystères, ce qui lui donnait des droits incontestables à la reconnaissance des valétudinaires. Il avait d’ailleurs à l’amour du peuple en général un plus noble titre ; c’était son attachement pour le pays, attachement tel, disait-on, qu’il mourait de douleur si on le transportait en terre étrangère. Eh bien ! l’ibis, qui, pour cette raison sans doute, était devenu l’emblème de l’Égypte, ne s’y trouve plus aujourd’hui, et c’est dans une autre contrée que l’ont découvert les naturalistes.

À la vérité, les rives du Nil nous présentent encore un oiseau (l’abou-hannès, de Bruce) qui a les plus grands rapports avec celui dont nous voyons la figure sur les monumens, dont nous trouvons dans les catacombes les dépouilles embaumées. La ressemblance est même si grande, que Cuvier, qui n’avait pas eu de peine à montrer l’erreur dans laquelle étaient tombés les naturalistes en donnant pour l’ibis sacré une espèce de cigogne à bec recourbé (un tantale), crut l’avoir retrouvé dans l’abou-hannès. C’est, en effet, la même taille, la même distribution de parties nues et de parties emplumées, le même arrangement de couleurs. Cependant il y a encore entre les deux espèces des différences constantes, quoique légères, tandis qu’on n’en peut reconnaître aucune quand on compare l’ibis des momies avec un ibis asiatique, dont nos collections se sont depuis quelques années enrichies.

Les Égyptiens étaient grands amateurs de symbolisme, et de même qu’ils voyaient dans l’ibis l’emblème de leur pays, ils voyaient celui du génie qui entretient le mouvement des sphères célestes dans certains insectes remarquables par l’habitude qu’ils ont de faire rouler à la surface du sol une boule dont je voudrais me dispenser de faire connaître la composition. Qu’il me suffise de dire que ces insectes, pour les anciens entomologistes, formaient, avec quelques autres genres dont ils se rapprochent par les mœurs autant que par l’organisation, la famille des bousiers. Latreille, après Weber, désigne ce genre sous le nom d’ateuchus ; d’autres naturalistes ont préféré conserver le nom de scarabée, qui est plus connu, et qui a été déjà employé par Pline pour les espèces dont nous avons à parler.

La figure des scarabées est répétée à profusion dans les bas-reliefs