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MÉLANGES D’HISTOIRE NATURELLE.

plorant, dans les environs de Memphis, un puits qui renfermait des momies d’animaux sacrés, y découvrit les restes fort reconnaissables d’une grande musaraigne d’espèce connue, le mandjourou. Ce fait qu’il signala, sans y attacher grande importance, ne tarda pas à en acquérir ; car les savans qui firent partie de notre expédition d’Égypte, en traçant la faune de ce pays, n’y comprirent aucune espèce de musaraignes. Or, le zèle qu’ils ont mis dans leurs recherches, et le temps qu’ils y ont consacré, ne permettent guère de supposer qu’un pareil animal eût pu échapper à leurs investigations s’il avait existé dans ce pays. La découverte d’Olivier devenait par là, je le répète, un fait très curieux, mais un fait dont on ne pouvait pas tirer de grandes inductions tant qu’il restait isolé. Il a cessé de l’être depuis quelques années. En effet, parmi les nombreuses curiosités rapportées d’Égypte en 1828, par M. Passalacqua, se trouvaient vingt-sept musaraignes embaumées. Dans ce nombre, il y en avait deux appartenant à la grande espèce déjà signalée par Olivier, deux qui paraissaient ne point différer d’une espèce assez commune en France, la musette, et vingt-trois qui révélaient l’existence d’une espèce entièrement nouvelle, aujourd’hui connue sous le nom de musaraigne sacrée, sorex religiosus. (Isid. Geoff.)

Il est à remarquer que ces vingt-sept musaraignes ne se présentaient pas comme autant de momies distinctes, mais qu’elles étaient toutes empâtées dans une masse de matière résineuse où se trouvaient aussi engagés quelques oiseaux et quelques reptiles. J’insiste sur cette circonstance, parce qu’elle prouve que la réunion de tous ces animaux n’est point le résultat d’une lente accumulation d’objets considérés comme précieux en raison de leur rareté. Toutes les musaraignes que renfermait cette triasse ont dû y être déposées à la fois ; elles ont dû mourir à peu de jours de distance. On en trouvait donc beaucoup à Thèbes.

Les renseignemens historiques ne nous apprenaient rien sur l’existence de ces petits mammifères dans l’ancienne Égypte. Il n’en est pas de même relativement à un oiseau dont on a depuis long-temps trouvé les momies. Vingt passages des auteurs grecs et latins nous parlent de l’ibis, nous le montrent habitant les temples, se promenant dans les rues, sur les places publiques des villes les plus populeuses. Il y pouvait, en effet, marcher en toute sûreté, car sa vie était mieux protégée par la loi que celle de l’homme même : tuer, fût-ce involontairement, un de ces oiseaux, c’était un crime que la mort seule pouvait expier.