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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

conquièrent et convertissent la Prusse, et le paganisme disparaît de l’Europe. Les faits que nous venons de rappeler sommairement expliquent comment s’est opéré le mélange des populations germaniques et slaves dans l’est de l’Allemagne et tout le long des côtes de la mer Baltique jusqu’à la Finlande. Voyons maintenant dans quelles proportions ce mélange existe aujourd’hui.

Les peuples purement allemands habitent l’Autriche, le Tyrol septentrional, la Bavière, la Souabe, la Franconie, la Hesse, la Thuringe, la Basse-Saxe (royaume de Hanovre), le Holstein, la Westphalie et les deux rives du Rhin : ce sont ceux qui s’appelaient autrefois Boyariens, Suèves, Alemans, Francs, Cattes, Saxons, Frisons. Dans la Haute-Saxe, le Brandebourg, le Mecklenbourg, la Poméranie, les Slaves, qui faisaient le fonds de la population, ont disparu ou sont devenus tout-à-fait Allemands. Restés en grand nombre dans la Lusace, la Styrie, la Silésie, ils sont en immense majorité en Bohême, en Moravie et dans les provinces composant le royaume d’Illyrie, telles que la Carinthie, la Carniole, etc. Ils ont conservé leurs anciens noms de Wendes, Sorbes, Tcheks, Slovaques, Hanaques, Horaques, Podzoulaques, Uscoques, etc. On en compte environ six millions sur le territoire de la confédération germanique, où ils forment à peu près le sixième de la population totale. Les provinces slaves de l’Allemagne appartiennent exclusivement à la Prusse et à l’Autriche, et cette race prédomine dans les états que ces deux puissances possèdent hors du territoire allemand. C’est une cause de faiblesse, un grand obstacle à l’unité, et probablement un danger pour l’avenir, à cause du voisinage du grand empire slave et du réveil des sentimens de nationalité, bien prononcé depuis quelque temps chez les peuples de cette famille. Outre trente millions d’Allemands et six millions de Slaves, on compte dans les états de la confédération deux cent mille Italiens habitant le Tyrol méridional, le Frioul et l’Istrie, trois cent mille Juifs dispersés par toute l’Allemagne, et un certain nombre de Français, descendant la plupart des réfugiés de l’édit de Nantes, et ayant formé dans quelques villes, comme Berlin, Cassel, Hanau, Offenbach, des colonies qui n’ont oublié ni la langue, ni les mœurs de leurs ancêtres. La race allemande est répandue en assez grand nombre hors du territoire germanique. Les descendans des chevaliers teutoniques et de leurs soldats sont établis le long de la mer Baltique, dans la Prusse royale, la Courlande et la Livonie ; la Suisse, sauf quatre ou cinq cantons, l’Alsace et une partie de la Lorraine, sont d’importans débris de l’ancien empire, où règnent encore la langue et les mœurs