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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

Les montagnes de l’Allemagne sont remarquables par les forêts dont elles sont revêtues : ce sont encore les intonsi montes du poète latin, et cette verte chevelure est l’une des principales beautés de la terre germanique. Les petites chaînes que nous avons nommées plus haut sont, à peu d’exceptions près, admirablement boisées, et l’on calcule que les forêts couvrent environ un tiers du territoire de la confédération. On a remarqué que les arbres verts dominent à l’est : ainsi la Saxe, la Bohême, la Franconie, la Bavière, le Tyrol, la Souabe, produisent surtout des sapins et des pins ; les arbres à feuilles, au contraire, abondent dans les chaînes qui accompagnent le Rhin ainsi que dans la Hesse et la Basse-Saxe. Le pin se montre presque exclusivement dans les plaines sablonneuses du nord.

Une terre aussi montagneuse doit être riche en produits minéraux, et, en effet, on y trouve tous les métaux connus, à l’exception du platine ; quelques-uns, et des plus précieux, s’y rencontrent en abondance. Aucune contrée peut-être n’est aussi riche en eaux minérales de toute espèce. Il suffit de nommer Aix-la-Chapelle, Bade, Pyrmont, Ems, Wiesbaden, Carlsbad, Tœplitz, et tant d’autres lieux célèbres où l’on vient chercher la santé de tous les coins de l’Europe.

L’Allemagne produit tout ce que lui permettent de produire les conditions physiques dans lesquelles elle se trouve, et le travail intelligent de ses habitans a admirablement secondé la nature pour la féconder et l’embellir. Ce pays, que les écrivains romains nous représentent comme si sauvage et si inculte, est aujourd’hui l’un de ceux où l’homme a tiré le plus grand parti du sol qu’il habite. L’agriculture y prospère, l’industrie y fleurit, le bien-être et l’aisance y sont répandus partout, à en juger du moins par l’apparence extérieure. Les routes sont belles, les communications faciles, les fleuves sont sillonnés par de nombreux bateaux à vapeur, des chemins de fer se commencent ou s’achèvent partout. Les gouvernemens, favorisés par une longue période de paix, ont travaillé à l’envi à procurer à leurs peuples ces divers instrumens de civilisation, et les progrès faits depuis vingt-cinq ans dans la voie des améliorations matérielles ont renouvelé presque entièrement la face du pays. Mais là, comme ailleurs, sous cet aspect de prospérité se cachent bien des malaises, bien des misères ; là, plus qu’ailleurs peut-être, existent dans les esprits des divisions infinies, des obstacles insurmontables à l’unité, des causes de désordres, moins en évidence sans doute que dans les pays où toutes les souffrances s’exhalent par les mille voix d’une presse libre, mais qui n’en sont pas moins réelles pour cela, et auxquelles