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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

des hautes vallées du Tyrol. La langue et les mœurs de l’Italie dominent de plus en plus à mesure qu’on descend l’Adige, et les bords de la mer ne sont peuplés que d’Italiens et de Slaves.

Toute l’Allemagne occidentale se rattache au bassin du Rhin : ce fleuve, quoiqu’il reçoive près de douze mille cours d’eau, grands et petits, est bien moins considérable et a un cours bien moins étendu que le Danube ; mais il joue un rôle bien autrement important dans l’histoire, et les pays qu’il vivifie par lui-même et par ses affluens ont été, pendant une longue suite de siècles, le centre de la civilisation germanique. Le Rhin prend sa source dans les hautes Alpes. Après s’être précipité des glaciers du mont Adule, il traverse le lac de Constance, tombe à Schaffhouse de cinquante pieds de haut, et arrive à Bâle, entraînant avec lui les trois quarts des eaux de la Suisse, que lui apporte l’Aar, grossi de la Saane, de la Reuss et de la Limmat. À Bâle, il tourne brusquement de l’ouest au nord, pour prendre sa direction définitive et suivre vers la mer l’inclinaison de la grande terrasse allemande. À son entrée en Allemagne, c’est comme un fleuve nouveau, sa largeur devient double,[1], il porte des bateaux de cinq à six cents quintaux de charge ; en même temps, il ralentit son cours pour se promener majestueusement dans la large et fertile vallée qu’il forme entre les Vosges et la Forêt-Noire. À sa gauche est la riche et industrieuse Alsace, Strasbourg et sa merveilleuse cathédrale, puis la Bavière rhénane avec Spire et son église byzantine, sépulture privilégiée des empereurs au moyen-âge ; à droite est le fertile Brisgau, où la jolie flèche de Fribourg rivalise avec le chef-d’œuvre d’Erwin de Steinbach, le pays de Bade avec ses rians vallons et ses plaines plantureuses, le Palatinat, non moins riche et non moins pittoresque, enfin la Hesse rhénane, qui s’étend sur les deux rives du fleuve et que le congrès de Vienne a enrichie de Worms et Mayence, deux des plus illustres villes de l’ancien empire germanique. À Manheim, le Rhin reçoit le Neckar ; qui, né à côté du Danube, lui apporte presque toutes les eaux du royaume de Wurtemberg. Vis-à-vis Mayence est son confluent avec le Mein, rivière importante qui traverse l’Allemagne dans toute sa largeur et lui forme comme une ceinture. Grossi de ce puissant affluent, il coule pendant quelque temps vers l’ouest, présentant au midi les vignobles de sa rive droite, contrée célèbre sous le nom de Rheingau ; puis il reprend sa direction vers le nord et s’ouvre une étroite issue à travers

  1. Elle est de 340 pieds à Schaffhouse, de 750 à Bâle, de 1,000 à 1,200 à Manheim, de 2,500 au-dessous de Mayence, de 1,500 à Cologne.