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DU GOUVERNEMENT REPRÉSENTATIF EN FRANCE.

causes fort distinctes en elles-mêmes une union scellée, pour ainsi dire, par la hache révolutionnaire, et, dans des intentions souvent plus politiques que pieuses, on exploita ces souvenirs de l’échafaud, si puissans sur l’imagination des peuples. Un dévouement exalté prétendit imprimer au front d’une royauté rappelée de l’exil une sorte de consécration surhumaine ; ainsi le clergé se trouva compromis dans une œuvre qui, sans être la sienne, paraissait provoquer des sympathies communes. Un poids immense d’impopularité pesait sur lui, lorsque le jugement de Dieu décida, pour la troisième fois, du sort des fils aînés de saint Louis, et l’on put trembler un instant en voyant la tempête battre à la fois les portes de Notre-Dame et celles du Louvre.

Mais lorsque le gouvernement nouveau eut dessiné son caractère, et qu’il eut rétabli la croix au faîte des temples ravagés par la barbarie ; lorsqu’investi du pouvoir redoutable de donner des successeurs à leurs évêques, il eut rassuré les catholiques par des choix qu’ils auraient faits eux-mêmes, il se prépara une réaction dont ce gouvernement recueille tous les jours et des témoignages nouveaux et des fruits plus abondans. Il peut rester de mode dans quelques cabarets de province de déclarer le catholicisme incompatible avec l’établissement de 1830 ; mais, entre les hommes ayant traversé les affaires, il n’en est pas un qui ne sache que la monarchie nouvelle a trouvé à Rome des facilités qui ne lui étaient pas départies ailleurs ; aucun d’eux n’a jugé les dispositions intimes du clergé français sur les boutades de quelques hommes de cour, et tous ont compris qu’un corps recruté dans les classes moyennes et dans le peuple n’avait besoin, que d’être rassuré sur le grand intérêt qu’il représente, pour engager au pouvoir, en échange de son concours, une soumission respectueuse et sincère.

C’est un fait d’une haute importance que ces dispositions du clergé, dispositions dont une polémique récemment soutenue par l’un de ses organes est venue fournir des preuves surabondantes. Le gouvernement de 1830 fût resté pouvoir révolutionnaire aux yeux du peuple, si une scission s’était établie entre l’antique foi et le trône nouveau, et de bons rapports avec le clergé n’étaient pas moins nécessaires pour lui imprimer son caractère véritable que des rapports pacifiques avec l’Europe. En enlevant le monopole des idées religieuses au parti qui le revendiquait, il a plus avancé sa chute qu’en gagnant contre lui dix batailles de Culloden. Pour peu qu’on ait étudié les dispositions de ce grand corps, et qu’on veuille bien n’en