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que celles que nous avons signalées dans les consonnances ; d’où il résulte que la musique est non-seulement l’harmonie des voix, mais encore celle de beaucoup d’autres choses dissemblables.

Les disciples. — Si nous avions prévu que le nœud de cette question dût être si difficile à dénouer pour des ignorans, nous aurions mieux aimé continuer de ne pas savoir ce que c’est que le monde mineur, que de nous jeter dans de telles difficultés.

Paphnuce. — Qu’importe la peine que vous avez prise, puisque vous savez à présent ce qui vous était auparavant inconnu.

Les disciples. — Il est vrai ; cependant nous avons peu de goût pour les discussions philosophiques. Notre faible esprit ne peut saisir les subtilités de votre argumentation déliée.

Paphnuce. — Vous vous moquez ; je ne suis qu’un ignorant, je ne suis pas un philosophe.

Les disciples. — Et d’où avez-vous tiré ces connaissances dont nous n’avons pu suivre l’exposition sans fatigue ?

Paphnuce. — C’est une faible goutte que, par hasard et sans la chercher, j’ai vue, en passant, jaillir des sources abondantes de la science ; je l’ai recueillie, et J’ai voulu vous en faire part.

Les disciples. — Nous rendons grace à votre bonté ; cependant cette maxime de l’apôtre nous effraie : « Dieu choisit les insensés suivant le monde, pour confondre les prétendus sages. »

Paphnuce. — Sages ou insensés mériteront d’être confondus devant le Seigneur, s’ils font le mal.

Les disciples. — Sans doute.

Paphnuce. — Toute la science qu’il est possible d’avoir n’est pas ce qui offense Dieu, mais l’injuste orgueil de celui qui sait.

Les disciples. — Cela est vrai.

Paphnuce. — Et à quoi la science et les arts peuvent-ils être plus justement et plus dignement employés qu’à la louange de celui qui a créé tout ce qu’il faut savoir, et qui nous fournit à la fois la matière et l’instrument de la science.

Les disciples. — Il n’y a pas de meilleur emploi du savoir.

Paphnuce. — Car mieux nous savons par quelle loi admirable Dieu a réglé le nombre, la proportion et l’équilibre de toutes choses, plus nous brûlons d’amour pour lui.

Les disciples. — Et c’est avec justice[1].

Paphnuce. — Mais pourquoi m’appesantir sur ce sujet, qui nous apporte peu de plaisir ?

Les disciples. — Apprenez-nous la cause de votre tristesse, pour que nous ne supportions pas plus long-temps le poids de notre curiosité.

  1. C’est là, il faut l’avouer, une assez belle apologie de la science pour un siècle d’ignorance et de barbarie.