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LA COMÉDIE AU DIXIÈME SIÈCLE.

Lorsqu’en 874 Hathumoda, première abbesse de cette maison, fut rappelée à Dieu, à l’âge de trente-trois ans, Wicbert, ancien religieux du couvent de Corbie en Saxe, devenu évêque d’Hildesheim, assista à ses funérailles et échangea avec les religieuses éplorées des gémissemens et des consolations que plus tard il rédigea en vers et nous a laissés dans un dialogue où il remplit le rôle principal sous le nom d’Agios, traduction grecque de son nom allemand. Ce dialogue, et le prologue en prose qui le précède, contiennent de nombreux détails sur la fondation de Gandersheim et sur la famille ducale de Saxe[1]. Plus tard, notre Hrosvita a aussi chanté dans un assez long poème la fondation de Gandersheim[2]. Nous possédons même sur ce sujet un poème allemand du commencement du XIIIe siècle[3]. Enfin, de nombreuses figures, représentant les bâtimens de cette abbaye, ainsi que les portraits et les costumes des abbesses, ont été insérées dans les Antiquitates Gandersheimenses de Leuckfeld, et achèvent de nous faire connaître, dans les moindres détails, cet important monastère saxon, berceau du théâtre moderne.

Quant à Hrosvita, nous ne possédons guère sur la vie de cette femme illustre d’autres renseignemens que le peu qu’elle nous apprend d’elle-même dans ses divers ouvrages et surtout dans ses préfaces, dont elle est heureusement assez prodigue. Cette merveille de l’Allemagne a été pour presque tous ceux qui ont parlé d’elle une occasion d’erreurs d’autant plus graves que ses écrits, source à peu près unique de son histoire, ont été plus long-temps moins étudiés et moins connus[4]. On ne s’accorde pas même sur son nom. On la

  1. Dialogus Agii de obitu sanctœ Hathumodœ abbatissœ, ap. Bern. Pez., Thesaur. anecdot. noviss., tom. I, part. III, pag. 311, seqq.
  2. Carmen de construct. cœnob. Gandeshem. — Ce poème, précieux pour l’histoire littéraire et monastique des IXe et Xe siècles, a été publié pour la première fois par Leuckfeld (Antiq. Gandersh., Wolfenb., 1709, in-4o, pag. 410, seqq.) ; puis, l’année d’après, par Leibnitz (Script. Brunsv., tom. II, pag. 319, seqq.), et, enfin, par Joh.-Chr. Harenberg (Hist. eccles. Gandersh., 1734, in-fol., pag. 469, seqq.). Il est regrettable que l’éditeur de 1717 ait négligé de joindre ce poème aux autres œuvres de Hrosvita. — Bodo et Harenberg citent une Vie en vers de S. Innocent et de S. Anastase, sorte de préface mise par Hrosvita devant son poème de la Fondation de Gandersheim. Cet exorde paraît perdu.
  3. Everhardi De Fundatione et incrementis Gandershem. ecclesiœ versus Saxonici antiqui, ap. Leibn., Script. Brunsv., tom. I, pag. 149, seqq., et ap. Leuckfeld, Antiq. Gandersh., pag. 353, seqq.
  4. À la fin du dernier siècle, un peu avant les grandes distractions de 1789, l’attention littéraire, long-temps détournée des origines, commençait à se porter vers Hrosvita. Dès 1785, Paphnuce était analysé brièvement dans un article du Mercure, reproduit dans l’Esprit des Journaux d’octobre 1785. Enfin, en 1788, dom Maugerard, bénédictin de Saint-Arnoul, adressa au Journal encyclopédique une notice sur Hrosvita, que répéta encore l’Esprit des Journaux d’avril 1788.