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POÈTES ET ROMANCIER DU NORD.

l’influence atmosphérique d’où provient, disent les physiologistes le spleen des Anglais. L’auteur de ces poésies a aimé, il a perdu celle qu’il aimait, et parfois il exprime ses regrets dans des élégies plus exaltées que celles d’Young, plus douloureuses que celles de Kirke White ; puis, après ce cri de désolation, le voilà qui revient sur lui même, et tâche de se maîtriser, et s’impose le douloureux repos de la résignation.

« Dors, s’écrie-t-il, ô mon pauvre cœur ; dors. Oublie ce que tu as recherché, ce que tu as aimé dans ce monde ; que nulle espérance ne trouble ton repos, et nul rêve ton sommeil !

« Pourquoi songes-tu encore à l’avenir ? que peux-tu en attendre ? Une plante salutaire pour guérir tes blessures. Hélas ! oublie encore cette pensée ; tu as cueilli les roses de la vie, et la plante qui doit te guérir fleurit dans la terre du sommeil.

« Dors comme le lys brisé par le vent d’automne, dors comme le cerf atteint par un dard, qui saigne dans son repos. Pourquoi regretter les jours d’autrefois ? Pourquoi te rappeler que tu fus heureux ? il fallait bien que ta joie se flétrît avec tes beaux jours.

« Tu as eu aussi ton mois de mai ; mais il ne devait pas durer éternellement. Ne cherche plus ces doux rayons que dans les ombres de l’hiver ; il fut un temps où le bonheur était avec toi. La terre avait reverdi, les oiseaux chantaient, et de suaves parfums inondaient ton temple d’amour.

« Te souviens-tu des doux embrassemens que tu as connus ? Te souviens-tu du cœur ardent qui te cherchait et du baiser de la jeune fille aimée ? Alors mes yeux lisaient dans ses yeux, et ma pensée se reflétait dans sa pensée. Alors c’était le temps de veiller, ô mon pauvre cœur ! Maintenant, il faut oublier et dormir. »

Voici un autre chant que plus d’un lecteur pourrait prendre pour sa propre élégie. Il est intitulé : Le Retour du Vieillard.

« Comme l’oiseau de passage qui, à la fin de l’hiver, revient visiter son île et sa demeure, je reviens à toi, ô ma terre natale, je cherche le repos évanoui des jours de mon enfance.

« Depuis que j’ai quitté tes rives aimées, j’ai traversé bien des mers, j’ai passé bien des années de tristesse. Souvent, dans les contrées lointaines, j’ai goûté quelque joie, mais souvent aussi j’ai versé des larmes amères.

« Me voici de retour, Je revois la maison où reposa mon berceau ; je