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autres relevant du mont Sinaï, détiennent à eux tous le cinquième environ des terres cultivables. Les moines sont les agens les plus zélés de la politique russe ; des tableaux religieux, des reliques, des ornemens d’église, des cadeaux de toute espèce envoyés de Saint-Pétersbourg et répandus avec discernement, les conservent dans d’excellentes dispositions pour le czar, qu’ils regardent comme le véritable chef de la religion grecque.

La magistrature, cet autre sacerdoce qui exerce sur les peuples une action si continue, si importante, a gardé le cachet de l’administration phanariote. La législation civile proprement dite est une mine que juges et avocats exploitent avec une rare impudeur. La réforme n’a pas encore percé les ténèbres de la chicane ; nous n’entrerons donc pas ici dans l’examen fastidieux de l’organisation judiciaire.

L’instruction publique a fait d’immenses progrès ; il est curieux de lire l’exposé des motifs des nouvelles lois relatives à cette partie de la constitution, en songeant qu’il a été rédigé dans les bureaux de la chancellerie russe. Je l’extrais textuellement du manuscrit français sur lequel a été faite la traduction valaque. « L’éducation est le premier besoin d’un peuple ; elle est la base et la garantie de toutes les institutions publiques ; c’est un devoir pour tout gouvernement d’offrir à la jeunesse le moyen de développer ses facultés intellectuelles et morales, et de lui donner une direction salutaire… Dieu a d’abord placé le devoir de l’éducation des enfans dans le cœur des parens ; mais il est peu de personnes qui, par leurs connaissances ou leur position, soient en état de satisfaire à cette importante obligation… Les unes ne sont pas assez éclairées ; les autres sont occupées d’un travail assidu ; d’autres enfin sont assez malheureuses pour ne pas savoir apprécier les avantages qui doivent résulter de l’accomplissement de ce devoir sacré : il est donc d’une absolue nécessité d’organiser des écoles publiques. »

L’instruction primaire est répandue sur une grande échelle ; mais, laissant de côté ce que je n’ai pu apprendre que par les autres, je préfère donner quelques détails sur le collége de Saint-Savain à Boukarest. Ce vaste établissement, dirigé par M. Poyénar, qu’un long séjour en France a rendu l’homme le plus capable de donner ses soins à une pareille administration, est parfaitement tenu. Cinq cents jeunes gens environ reçoivent l’éducation à ce collége. Les études sont divisées en quatre classes, graduées de telle sorte, que chaque élève, sans distinction de naissance ou de fortune, car les cours