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LES SEPT CORDES DE LA LYRE.

le peintre.

Tiens toujours… Un peu plus droite, bon… j’y suis.

le critique.

Cette tête de muse, qui est au sommet et vers laquelle les deux syrènes se courbent avec tant de grace, est digne de l’antiquité.

le maestro.

C’est Polymnie ou sainte Cécile ?

le poète.

C’est Érato. La lyre est bien plus l’emblème de la poésie que celui de la musique.

le maestro.

Voilà une singulière prétention ! Essayez donc de faire résonner l’instrument en récitant des vers ! Vous ne feriez même pas vibrer une guimbarde avec tous vos sonnets, mon cher ami.

le poète.

La lyre n’était, chez les anciens, qu’un accessoire, un accompagnement de la déclamation, un moyen de soutenir la voix et de scander le vers sur une certaine mesure… Par exemple, tenez…

le maestro, riant.

Ah ! bon ! vous allez jouer de la lyre à présent ?

le poète.

Pourquoi non ? Il ne s’agit que de connaître la gamme sur les cordes et de suivre le rhythme poétique. Écoutez !

méphistophélès, à part.

Ô lyre, voici ta fin !

(Le poète déclame des vers en touchant les cordes de la lyre qui reste muette.)
méphistophélès, à part.

Peste soit de l’esprit rebelle qui n’a pas voulu parler !

le critique, bas au peintre.

Voilà les plus mauvais qu’il ait encore faits.

le poète.

Eh bien ! que dites-vous de cela ?

le maestro.

Les vers sont beaux.

le poète.

Mais l’accompagnement ! vous ne m’auriez pas cru capable d’accompagner ainsi ?

le maestro.

Comment, l’accompagnement ?