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LA PAPAUTÉ AU MOYEN-ÂGE.

mois. « Je vous prêterai secours, disait le pape à l’empereur, selon le devoir de ma charge, quand vous me le demanderez. Je vous donne une vraie paix et à tous ceux qui sont ou ont été de votre parti du temps de cette discorde[1]. « De son côté, l’empereur, dans un autre écrit, disait que, par amour de Dieu, de la sainte église et du pape, il remettait toute investiture par l’anneau et la crosse, et accordait dans toutes les églises de son royaume et de son empire les élections canoniques et les consécrations libres. Il restituait à l’église romaine les terres et les régales de Saint-Pierre, qui lui avaient été ôtées du vivant de son père ou sous son propre règne, et qu’il possédait ; il promettait d’aider fidèlement à la restitution de celles qu’il ne possédait pas[2]. M. de Maistre fait très bien ressortir l’importance de la question des investitures au moyen-âge quand il dit : « Les papes ne disputaient pas aux empereurs l’investiture par le sceptre, mais seulement l’investiture par la crosse et l’anneau. Ce n’était rien, dira-t-on. Au contraire, c’était tout. Et comment se serait-on si fort échauffé de part et d’autre, si la question n’avait pas été importante ? Les papes consentirent à l’investiture par le sceptre, c’est-à-dire qu’ils ne s’opposaient point à ce que les prélats, considérés comme vassaux, reçussent de leur seigneur suzerain, par l’investiture féodale, ce mère et mixte empire (pour parler le langage féodal), véritable essence de fief qui suppose, de la part du seigneur féodal, une participation à la souveraineté, payée envers le seigneur suzerain qui en est la source, par la dépendance politique et la loi militaire. Mais ils ne voulaient point d’investiture par la crosse et par l’anneau, de peur que le souverain temporel, ne se servant de ces deux signes religieux pour la cérémonie de l’investiture, n’eût l’air de conférer lui-même le titre et la juridiction spirituelle, en changeant ainsi le bénéfice en fief ; et, sur ce point, l’empereur se vit à la fin obligé de céder. Ainsi les luttes furieuses de Grégoire VII et d’Henri IV aboutissaient à une transaction, et l’équilibre commençait à s’établir entre le sa-

  1. « Ego Callixtus, etc., concedo electiones episcoporum et abbatum Teutonici regni qui ad regnum pertinent, in præsentia tua fieri, absque simonia et absque violentia…………… Electus autem regalia per sceptrum a te recipiat, et quæ ex his jure tibi debet, faciat………… Do tibi veram pacem, et omnibus qui in parte tua sunt vel fuerunt tempore hujus discordiæ. » (Corps diplomatique du droit des gens, tom. Ier, pag. 67.)
  2. « Ego Henricus, etc., dimitto Deo, et sanctis ejus apostolis Petro et Paulo et sanctæ catholicæ ecclesiæ omnem investituram per annulum et baculum, et concedo in omnibus ecclesiis fieri electionem et liberam consecrationem : possessiones, et regalia beati Petri, quæ a principio hujus discordiæ usque ad hodiernam diem, sive tempore patris mei, sive etiam meo ablata sunt, quæ habeo, eidem sanctæ romanæ ecclesiæ restituo : quæ autem non habeo, ut restituantur fideliter adjuvabo. » (Ibid.)