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LA HONGRIE.

classe de citoyens, les campagnes prendront leur essor, et ces immenses villages de quinze à vingt mille ames, si nombreux en Hongrie, deviendront un jour des cités riches et populeuses.

L’agriculture, délivrée de ses entraves, est destinée à fleurir dans ces belles contrées trop long-temps désolées par un système oppressif. Mais à quoi servirait d’activer la production, si la consommation n’augmentait point dans le même rapport ? La Hongrie peut exporter beaucoup de denrées et de matières premières, mais elle est privée de voies de communication. L’assiette des impôts se lie essentiellement à la propriété industrielle d’un pays. Les nobles hongrois ont enfin senti que leur privilége de ne point contribuer aux charges directes de l’état, lorsqu’ils acquittaient sans murmure les droits exigés par la régie et la gabelle, leur était plus nuisible qu’utile, et qu’il n’y a point de honte à payer lorsqu’on surveille l’emploi de son argent. Il a été question plus haut du péage général établi sur le pont de Pesth ; on a vu que l’auteur de cette proposition voulait poser un principe ; une conséquence assez importante en a été déduite à la même diète. Tous les possesseurs nobles ou non nobles de terres autres que celles qui ont été originairement concédées par le roi, devront (art. 2) acquitter l’impôt foncier, et la Hongrie aura des routes.

Les merveilles de l’industrie, les admirables spéculations du génie français fécondées par la patiente et laborieuse Angleterre, l’emploi de la vapeur comme force locomotive, ont vivement frappé tous les esprits. Malgré les prospectus dictés par le charlatanisme, malgré les revers inséparables de toute entreprise à son début, les peuples semblent comprendre qu’il y a dans ces grandes découvertes comme un lien mystérieux qui doit unir plus étroitement les sociétés modernes. Les Hongrois ont partagé cette préoccupation générale, et dans leur dernière diète, lorsqu’ils avaient à peine quelques chemins frayés dans tout leur pays, ils ont pensé à le doter d’un réseau de rail-ways. Si l’on songe que la Hongrie est riche en mines de fer et de houille, qu’elle offre une surface plane dans presque toute son étendue, et qu’enfin elle serait obligée de supporter de grandes dépenses pour établir un système complet de routes ordinaires, on ne trouvera peut-être plus cette idée trop folle ou trop ambitieuse. Si l’on eût dit, il y a vingt ans, que bientôt des bateaux à vapeur sillonneraient le Danube, qui n’eût traité le prophète de visionnaire ? L’article 25[1]

  1. Toutes les dispositions législatives décrétées par la diète et sanctionnées par le roi sont appelées articles.