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avec des talaris. Le mouvement annuel du dépôt serait donc de 3 à 4,000,000 de francs ; sa valeur constante n’est guère que de 1 à 2,000,000 ; il est d’ailleurs extrêmement irrégulier et variable : c’est un champ où quelques découvertes fructueuses remplacent les récoltes régulières. Lorsque le commerce de l’Inde avec l’Europe suivra de nouveau sa ligne naturelle de Suez, le dépôt des denrées orientales en Égypte reprendra une partie de l’importance qu’il a eue dans l’antiquité et dans le moyen-âge.

Si l’on considère combien il est dispendieux et irrationnel que tous les produits de l’Asie aillent remonter dans les ports du nord de l’Europe, en faisant le circuit du cap de Bonne-Espérance, pour descendre ensuite et se répartir jusque sur le littoral méditerranéen, on ne pourra s’empêcher de reconnaître que, depuis trois siècles, le commerce a suivi, comme on dit, le chemin de l’école, et que le temps de reprendre sa voie la plus courte et la plus économique est enfin venu ; car l’Orient, qui repoussait la civilisation européenne parce qu’elle s’était montrée hostile et conquérante pendant les croisades, l’appelle aujourd’hui parce qu’elle est industrielle et pacifique. Cette tendance, qui existe déjà dans les esprits, passera bientôt dans la pratique ; les grands travaux pour le rétablissement de la ligne de Suez seront faits par les nations européennes associées. L’Angleterre en reconnaîtra la nécessité, et y apportera sa coopération puissante ; et cette grande restauration commerciale, en achevant la résurrection de l’Égypte commencée par Mohammed-Ali, pourra devenir la solution matérielle de la question d’Orient, et le gage de la paix du monde.

Le dépôt des denrées égyptiennes se compose des produits de la Basse, de la Moyenne et de la Haute-Égypte, et de quelques articles de l’Yemen, du Sennaar et du Kordofan. Ce sont :

1o  Les cotons en laine, céréales, riz, safranum, indigo, opium, tabac, soies, légumes secs, graines de lin, lin, dattes, sucre, etc., produits agricoles de l’Égypte ;

2o  Les tissus de lin, de coton, cuirs et peaux, sel nitre, ammoniaque, nattes, etc., produits manufacturés de l’Égypte ;

3o  La gomme, les dents d’éléphant, du Sennaar et du Kordofan ;

4o  Le café d’Yemen.

Le chiffre annuel des différens produits qui entrent dans ce dépôt est variable, surtout pour les produits agricoles. Les céréales et légumes secs, blés, fèves, lentilles, orge, maïs, s’élèvent ordinairement à 3 millions d’ardebs ; le riz de Damiette donne 80 mille ardebs, et celui de Rosette 60 mille ; le sucre, 32 mille quintaux ; le coton, 300 mille quintaux ; le safranum, 3,500 quintaux ; l’indigo, 175,000 mille okes ; la soie, 65,000 okes ; l’opium, 15,000 okes ; le tabac, 100,000 quintaux ; le lin, 50,000 quintaux ; la graine de lin, 60,000 ardebs. Les principaux produits manufacturés sont 25,000 pièces d’indienne, 12,000 mouchoirs imprimés, 2,000,000 pièces de toile de co-