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REVUE. — CHRONIQUE.

L’opposition fait grand bruit du passage de la princesse de Beira et du prince des Asturies à travers les Pyrénées. Nous voudrions voir l’opposition chargée de garder les Pyrénées, et d’intercepter toute communication avec l’Espagne de ce côté de la France. Tout ce qu’il est humainement possible de faire, en ce genre, a été exécuté. Les cordons militaires ont été encore resserrés, toutes les mesures prises avec plus de rigueur ; mais un passage isolé peut déjouer les meilleures mesures. Nous ne croyons pas que la cause du prétendant gagne beaucoup à l’arrivée de la princesse de Beira ; sa présence au camp de don Carlos ne sera, au dire des personnes qui connaissent le mieux les affaires du carlisme espagnol, qu’un élément de discorde de plus introduit dans son sein. Quant au passeport donné, selon les journaux, par M. de Saint-Aulaire à la princesse et à son fils, d’accord avec M. de Metternich, c’est une de ces inventions quotidiennes sur lesquelles s’est déjà épuisée toute notre admiration. En tout autre temps, il suffirait d’indiquer l’impossibilité de ce fait, et de demander si un ambassadeur du roi des Français pourrait commettre un acte aussi hostile à un gouvernement allié de la France ; mais en ce temps-ci, il n’est pas superflu de démentir une pareille assertion, et nous le faisons.

Les mutations qui ont eu lieu dans le personnel des préfets ne pouvaient être approuvées par l’opposition. Elle n’y a vu que des arrangemens de famille, du népotisme, comme elle dit. Heureusement on sait à quoi s’en tenir, et M. de Montalivet, qui s’occupe si sérieusement et avec une expérience si consommée des intérêts des départemens, trouvera partout la justice qu’on lui refuse dans quelques journaux. Croira-t-on, par exemple, que c’est M. Fonfrède qui force la main à M. de Montalivet dans un choix, M. Decazes dans un autre ; que le ministre a obéi à des influences de famille et de coterie, en nommant M. Meunier, beau-frère de M. Odilon Barrot ; en faisant passer, de la sous-préfecture de Jonzac à la préfecture du Tarn, M. Narjot, beau-frère de M. Duchâtel ; en nommant M. Desmousseaux de Givré, beau-frère de M. Villemain ? L’éloignement de M. le comte de Preissac de la préfecture de Bordeaux a suscité encore d’autres griefs. M. de Preissac doit, dit-on, sa disgrace, si disgrace il y a, à son neveu, député de l’opposition. Il est vrai qu’on avait déjà dit, en d’autre temps, que M. de Preissac avait été nommé à la préfecture de Bordeaux, grace à son neveu, qui ne figurait pas alors dans l’opposition. Le moyen de contenter l’opposition, pourra-t-on nous le dire ? On nous assure qu’une longue querelle s’était engagée entre le préfet de la Gironde et le procureur-général, que l’un se faisait défendre par une feuille doctrinaire, l’autre par une feuille libérale ou radicale, toutes deux opposées au gouvernement, et que l’administration souffrait de ce conflit et de ce scandale. L’éloignement des deux fonctionnaires serait-il motivé par ces circonstances ? Nous l’ignorons ; mais, en tout cas, ce motif nous semblerait suffisant. Quant à la nomination de M. de l’Espée, ancien député doctrinaire, on a très bien fait observer à la presse qui se récrie contre la nomina-