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minot, la réforme électorale est plus nécessaire que jamais. Hâtons-nous donc de signer la pétition de la réforme électorale ! Quand chaque garde national sera électeur, nul doute qu’on ne nommera plus des députés tels que M. Jacqueminot. La garde nationale de Paris et de la banlieue, qui courait avec tant d’ardeur aux émeutes, et qui les réprimait avec tant d’énergie, va certainement chercher ses candidats dans les clubs républicains, à moins qu’elle ne les prenne dans les rangs du parti de la Gazette de France et de la Quotidienne, pour lequel elle a montré tant de sympathie en 1830 ! Nous sommes bien certains que cette nouvelle épreuve ne tournerait pas encore au profit de l’opposition ; aussi ne compterait-elle pas s’arrêter là, si elle arrivait au résultat qu’elle se propose. La garde nationale n’aurait pas plus tôt le droit d’élection, qu’on s’occuperait à dénaturer la garde nationale ; car telle qu’elle est aujourd’hui, la garde nationale est l’ennemie de tous les esprits remuans et des meneurs de clubs, de tous ceux qu’elle combat depuis huit ans, et qui se trouvent en première ligne parmi les partisans de la pétition.

Mais voici qu’un capitaine de la garde nationale, qui désapprouve la réforme, vient de donner sa démission. Noble réponse à quelques gardes nationaux de sa compagnie, qui le menaçaient de lui retirer leurs voix aux prochaines élections ! Dans un gouvernement de majorité comme le nôtre, rien n’est plus conforme aux principes constitutionnels qu’un tel procédé. Vous en appelez aux élections futures de la garde nationale ? a dit M. Phalipon aux pétitionnaires ; vous me menacez trois ans d’avance d’une non-réélection ? et moi, je vous appelle aux élections à l’heure même. La majorité jugera entre vous et moi, et je vous offre l’occasion d’accomplir dès à présent vos menaces. Croirait-on que les feuilles de la coalition, que les organes du parti parlementaire, voient là une conduite blâmable, un acte inconstitutionnel ? En donnant sa démission, M. le capitaine Phalipon entrave la liberté de signer la pétition, liberté que donne la charte à tous les citoyens ! En se retirant du commandement, en rentrant dans les rangs, il gêne l’opinion de ses camarades ! On a été même jusqu’à dire que la démission de M. Phalipon tend à désorganiser la garde nationale, tant la sollicitude des radicaux pour la garde nationale est devenue grande. Parfaitement : M. Phalipon est un grand coupable, un mauvais citoyen, comme M. Jacqueminot, comme tous ceux qui ne s’enrôlent pas sous la bannière levée par la Gazette de France, pour marcher à la liberté, perdue sans doute en 1830, et que les légitimistes, pieusement suivis des républicains, se chargent de retrouver ! En attendant, il nous tarde de savoir si la compagnie de M. Phalipon nommera à sa place quelque signataire de la pétition pour la réforme électorale. Ils sont en si grand nombre, au dire du parti, qu’on n’aura que l’embarras du choix. Mais si, par impossible, M. Phalipon était réélu capitaine de la compagnie, serait-il permis d’en conclure que, dans cette compagnie de garde nationale du moins, on rejette la pétition de la réforme ? Cependant vous verriez que certains journaux nous démontreraient le contraire et qu’ils nous prouveraient