Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 16.djvu/241

Cette page a été validée par deux contributeurs.
237
LA PRESSE POLITIQUE.

versaires ? Or, monsieur, je ne crains pas d’avancer que depuis trois mois et demi, ni le bon sens ni la loyauté n’ont caractérisé les discussions de la plupart des organes quotidiens de la presse opposante, et qu’il faut plutôt s’en alarmer pour elle que pour le pouvoir qu’elle attaque.

Quand on examine de bonne foi l’état des esprits et de la société, on reconnaît que de plus en plus tout s’apaise et se consolide. Il est visible que la France, après cinquante années de mouvemens révolutionnaires, veut goûter d’une vie plus paisible et plus régulière. Pourquoi ? Parce qu’à ses yeux la question de gouvernement est résolue. Ni la constitution de 91, ni la république, ni l’empire, ni la restauration, n’avaient pu lui inspirer cette confiance ; la constituante détruisait l’ancienne monarchie, et régénérait la société, mais ne pouvait fonder un gouvernement ; la république fut une crise sublime dans nos camps, hideuse dans nos villes ; l’empire, une époque qui trouva sa raison et ses commencemens dans la nécessité de l’ordre, et sa fin dans les excès de la gloire ; la restauration, une gageure que le passé devait perdre contre le présent. Aujourd’hui le pays estime que les conditions nécessaires d’un gouvernement national sont remplies ; contrat synallagmatique, dynastie nouvelle et populaire, équilibre constitutionnel entre la royauté et la démocratie, voilà le prix de cinquante années de troubles et de labeurs. Le pays songe sérieusement à cultiver ces fruits achetés si cher, et il se prend à aimer son repos comme un héritage que les sueurs d’un père ont transmis. Or, le repos public consiste dans l’activité des particuliers, dans l’ardeur avec laquelle chaque citoyen vaque aux travaux de l’industrie, des arts, de la science, du commerce, de l’agriculture. Nous avons aujourd’hui ce consolant spectacle. L’industrie et l’agriculture sont fécondées par des efforts nouveaux qui doivent en doubler les résultats, parce que la confiance est revenue, parce que les capitaux, loin de craindre les entreprises, vont les chercher et les provoquer ; parce que les propriétaires, entièrement rassurés, ne se tiennent plus à l’écart, se mêlent aux affaires communes, aux élections municipales et politiques, et s’associent à tout ce qui peut améliorer la richesse agricole. Les beaux arts et les sciences sont redevenus l’objet du culte fervent d’adorateurs nombreux : jamais on n’a plus fait d’architecture, de tableaux, de statues, de voyages, de recherches érudites, d’explorations de tout genre. Tous les hommes jeunes cherchent à s’ouvrir une carrière, et s’éloignant de plus en plus de vieilles querelles qui ne sont pas leur cause,