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férente et lassée, il rencontre tout à coup un groupe pieusement incliné autour d’un vieux parchemin ; quand il aperçoit sur cette feuille illisible, quelques traces de signature, quelques croix informes plus d’à-moitié effacées par le temps, alors il se sent en présence d’un monument plus vivant que tous ceux qu’il vient d’entrevoir ; il lui semble qu’il donnerait toutes ces œuvres de la science et du génie pour ce papier vers lequel tant de générations ont reporté leurs pensées, et dont la vue fait encore battre tant de cœurs.

Pendant plus d’un siècle, à dater de cette époque, cette alliance se maintint presque constamment par l’effet des mêmes causes, et la liberté anglaise marcha, pour ainsi dire, à coups d’insurrections. Les statues de Merton et de Marlebridge furent arrachées comme la charte de Runnimède et celle des forêts. Un étranger, Simon de Montfort, devenu contre Henri III le chef d’une ligue aussi formidable que celle devant laquelle avait reculé l’astuce de Jean-sans-Terre, n’hésita pas à relever d’une manière plus éclatante encore les restes de la population saxonne. Le premier il appela les bourgeois des villes, auxquels l’industrie naissante commençait à préparer quelque importance, à délibérer en parlement conjointement avec les lords spirituels et temporels.

Ce parlement ou conseil national, ainsi que le qualifie la charte de Jean-sans-Terre, était en Angleterre, aux temps qui suivirent la conquête, ce que les assemblées de ce genre furent à la même époque, dans toute l’Europe, soumise au droit féodal.

Là siégeaient les prélats et abbés, à titre de lords spirituels, en même temps que comme seigneurs temporels, à raison des hauts domaines pour lesquels ils étaient assujettis au service militaire in capite ; puis les barons relevant immédiatement de la couronne, et obligés, par ce fait même, d’assister le roi en son conseil comme à la guerre. Les simples chevaliers qui tenaient des terres sous des obligations analogues, furent aussi mandés aux parlemens, non pas en masse, ce qui ne se pouvait à raison de leur nombre, mais par des députations, dont le mode d’élection varia selon les circonstances et les temps. De là sont sortis ces membres pour les comtés, qui, aujourd’hui même et après la réforme parlementaire, constituent une sorte de corps intermédiaire au sein de la représentation britannique.

Vainement chercherait-on trace, dans les temps qui suivirent la conquête normande, de la présence des bourgeois des villes au sein du grand conseil national. Plus tard encore, ils n’apparaissent que fort rarement, et d’une manière en quelque sorte incidente. Ils y