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REVUE. — CHRONIQUE.

l’étude des idiomes germaniques et orientaux. Ses longs voyages dans le Nord, les progrès qu’il a fait faire à la connaissance de l’éthiopien, la confiance de M. de Sacy qui l’avait chargé de dresser à la Bibliothèque du roi le catalogue des manuscrits de cette dernière langue, l’important ouvrage sur l’Edda dont il est l’auteur, et qui s’imprime à l’Imprimerie royale, désignaient d’avance M. Bergmann pour la chaire de littérature étrangère, créée près la Faculté des lettres de Strasbourg. Nous ne sommes point étonnés que la presse quotidienne n’ait pas connu ces détails, car elle attaque chaque jour mille choses qu’elle est à même de mieux savoir, et qu’elle veut cependant ignorer. Le choix de M. Félix Ravaisson pour la chaire de philosophie de la Faculté de Rennes n’a pas trouvé d’excuse dans le titre d’agrégé conquis avec éclat par ce jeune écrivain, et dans son travail si remarquable sur la Métaphysique d’Aristote qu’a couronné l’Institut. La Revue des Deux Mondes a eu, selon le Journal Général, une fort large part dans ces nouvelles Facultés des lettres. Le Journal-Général voudrait-il faire un crime à la Revue du mérite de ses collaborateurs ? Les doctrinaires nous avaient jusqu’ici habitués à plus d’habileté. Quoi qu’il en soit, nous acceptons le blâme de cette feuille comme un éloge. Nous ne sachions pas que M. Marmier, qui voyage dans le Nord et qui ne saura sa nomination que plusieurs mois après la création des Facultés ; que M. Quinet, qui vivait depuis long-temps en Allemagne, dans la retraite, et dont on a faussement annoncé le refus ; nous ne sachions pas enfin que M. Gustave Planche, qui n’a guère, à notre connaissance, introduit dans la critique un ton de solliciteur et de courtisan, aient eu d’autres titres à la bienveillance de M. de Salvandy que leur savoir et leur talent. De pareils choix n’ont pas besoin d’être justifiés auprès de nos lecteurs ; ils honorent à la fois le ministre qui les a faits et les hommes auxquels ils s’adressent. M. de Salvandy a vu tout simplement dans M. Quinet un esprit sérieux qui réunit l’érudition littéraire à une haute portée philosophique ; dans M. Planche, un critique ferme en ses doctrines, élevé et pur dans son style ; dans M. Marmier enfin, un écrivain élégant et profondément initié aux littératures du Nord. Peut-être M. Guizot, qui tient plus sans doute au dévouement qu’au talent réel, n’eût-il pas hésité à aller chercher ses professeurs de facultés dans la rédaction du Journal Général ; mais M. de Salvandy, qui paraît, au contraire, tenir plus au talent qu’au dévouement, prend les hommes de mérite là où il les trouve, et nous ne doutons pas que les investigations du ministre de l’instruction publique ne se fussent étendues jusqu’au sein de certains journaux, si son expérience et la voix publique ne lui eussent signalé d’avance la stérilité du sol.

DU SYSTÈME MONÉTAIRE DES FRANKS SOUS LES DEUX PREMIÈRES RACES, PAR M. BENJAMIN GUÉRARD, DE l’INSTITUT[1].

Le traité de Le Blanc sur les monnaies de France jouit d’une réputation ancienne, universelle et méritée ; l’exactitude y est, d’ordinaire, jointe à la

  1. Brochure in-8o, tirée à très petit nombre.