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DE L’AMÉRIQUE DU SUD.

larités de la question. Nous nous contenterons de rappeler sommairement quelques points auxquels se rattachent des conséquences que nous croyons utile de recueillir.

On remarquera d’abord que, depuis la reconnaissance des nouvelles républiques, et même dès le premier envoi des agens consulaires français auprès d’elles, la France a gardé, dans leurs révolutions et dans les luttes des partis qui les divisent, la plus scrupuleuse neutralité. Il y a plus, outre la neutralité officielle du gouvernement français, les Français établis dans le pays se sont conformés au même principe, de sorte que les révolutions si fréquentes, les triomphes successifs des divers partis, l’avénement de leurs chefs au pouvoir les uns après les autres, n’auraient pas dû avoir des résultats fâcheux pour les étrangers. Loin de là, les étrangers ont toujours souffert de ces révolutions, et n’en ont jamais profité ; et ils en ont souffert de toutes les manières : du désordre matériel d’abord, et puis de ses longues suites. Ainsi, les violences populaires en premier lieu, comme à Santiago de Chili, au mois de décembre 1829, et le pillage du Parian à Mexico, le 4 décembre 1828, événement déplorable, dont les Français qui en ont été victimes, attendent encore, au bout de dix ans, l’insuffisante réparation ; en second lieu, l’interruption du cours de la justice, l’appauvrissement du trésor, la stagnation du commerce et toutes les pertes qui en résultent, le long affaiblissement de la force sociale, plus nécessaire et plus impuissante que jamais ; voilà comment les étrangers souffrent directement de commotions politiques auxquelles ils n’ont point pris la moindre part. L’Angleterre a suivi à peu près la même ligne de conduite, et ses sujets, au Mexique du moins, n’ont pas été plus ménagés, n’ont pas trouvé une justice plus prompte ni plus accessible[1]. Il y a donc dans tous les partis, et à

  1. En 1836, après les revers et la prise de Santa-Anna dans le Texas, le gouvernement mexicain décréta, pour subvenir aux frais d’une seconde expédition, un emprunt forcé, auquel il voulut assujétir tous les étrangers, et dont la répartition s’opéra d’ailleurs avec la plus révoltante inégalité. Dans cette circonstance, les Anglais de Mexico, faiblement soutenus par le ministre d’Angleterre, profitèrent de l’énergie avec laquelle M. Deffaudis réclama en faveur des Français, et tous les étrangers se montrèrent fort reconnaissans de l’opiniâtre résistance que ce ministre opposa avec succès aux prétentions du gouvernement mexicain. Cependant on affectait alors de grands ménagemens pour l’Angleterre, et on lui payait des à-comptes sur une indemnité de pillages, parce qu’on espérait l’intéresser en faveur du Mexique contre la séparation du Texas, et surtout contre l’adjonction de ce territoire à la république des États-Unis. L’Angleterre avait aussi laissé percer des projets d’envahissement que le Mexique voulait détourner à tout prix, et dont la vague menace avait eu son effet. Depuis, on a continué à caresser l’Angleterre, et le ministre des affaires étrangères du Mexique, M. Cuevas, dans son dernier rapport au congrès, s’est plu à rappeler que l’Angleterre était la première puissance de l’Europe qui eût reconnu la république. Enfin, pour