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expressément que l’ami de la philosophie est aussi celui des mythes[1]. La métaphysique et la religion procèdent toutes deux par divination idéale, par hypothèse ; mais il y a cette différence que la métaphysique convie l’humanité à l’examen de ses hypothèses, car la science implique la liberté, tandis que, jusqu’à présent, les religions positives ont appelé crimes la critique, le doute et le dissentiment.

Les religions positives ont droit au plus profond respect ; elles expriment à un certain degré quelques idées et quelques sentimens du genre humain, et aussi elles sont la loi de fait des sociétés. Depuis trois siècles, les conditions de leur existence ont changé ; car il leur faut vivre en face de la liberté de la pensée. Il est désirable que les religions positives aient de plus en plus le sentiment de cette situation nouvelle, parce qu’alors elles travailleront elles-mêmes à se modifier pour se maintenir, et s’épargneront ainsi les cruels avertissemens du temps, qui, suivant l’expression d’un poète, vieillit tout[2].


Lerminier.
  1. Livre Ier de la Métaphysique, chap. II.
  2. Ἀλλ’ἐϰδιδάσϰει πάθ’ὁ γηράσϰων χρόνος ; Prométhée d’Eschyle.