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séjourner à Tehran. » Il ne faut pas oublier que tout ceci se passait quelques mois seulement avant que la guerre éclatât. Abbas-Mirza, le prince héréditaire, s’y préparait dès-lors, et sans doute il cherchait à réveiller partout la haine contre les Russes, afin de donner quelque énergie au sentiment national. Il est probable que depuis lors le traité de Tourkman-Tchaï et les revers qui l’ont amené, ont singulièrement adouci les procédés des Persans envers leurs voisins du nord.

M. Eichwald, ainsi repoussé, jugea inutile d’attendre une permission qui ne viendrait probablement jamais, et se décida à regagner Bakou, sans avoir vu le Ghilan que de loin. Cette province, qui est limitrophe des possessions russes, est une des plus riches de la Perse. Ses produits bruts sont la soie, le riz, les oranges, les fruits de toute espèce, le chanvre, les bois de construction, etc. On y fabrique des étoffes de soie, des draps, des cotonnades, de la coutellerie et des armes de fer et d’acier. Le Ghilan et le Mazenderan exportent beaucoup de soies grèges : il en sort du Ghilan seul 900,000 livres anglaises par an ; deux dixièmes vont à Astrakan, le reste va à Bagdad, à Constantinople et dans l’intérieur de la Perse.

Occupons-nous maintenant des provinces conquises par la Russie à l’orient et au midi de la chaîne caucasienne. Depuis Astrakan jusqu’aux bouches du Terek, s’étend une steppe immense où l’on ne trouve ni bois, ni bonne eau, et qui ne produit qu’un peu d’herbe pour les troupeaux des tribus nomades qui la parcourent. Cette steppe est bornée au nord par le Volga et le Don, à l’est par la mer Caspienne, à l’ouest par la mer d’Azof, au midi par la chaîne caucasienne. Le Kouban et le Terek, deux fleuves qui, nés au pied des mêmes glaciers, courent presque aussitôt dans des directions opposées, l’un vers la mer Noire, l’autre vers la mer Caspienne, séparent cette région stérile et déserte des belles vallées du Caucase. Quand on a passé le Terek près de son embouchure, on entre dans le Daghestan, qui forme une longue zone entre la mer et les montagnes. Quelques détails empruntés à M. Eichwald nous apprendront jusqu’où s’étend l’autorité de la Russie dans ces contrées.

Les principales villes du Daghestan qui se divise en septentrional et méridional sont Tarki et Derbend. Tarki, ou plutôt Tarkhou, était gouvernée, en 1825, par un souverain héréditaire appelé chamkal, qui était tributaire de la Russie. Sur la montagne qui la domine, Yermolof a fait bâtir une forteresse appelée l’Orageuse, à cause des fréquens orages auxquels elle est exposée, et destinée à pro-