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DES ÉTUDES HISTORIQUES DANS LE NORD.

Trois hommes entre autres se sont distingués dans cette école ; ce sont MM. Fryxell, Strinnholm et Geiier.

M. Fryxell est un écrivain habile, élégant, qui fait aimer l’histoire par l’art avec lequel il la raconte. Nul historien suédois n’a su donner tant de couleur à son récit. Nul ne sait mieux que lui saisir l’individualité d’un personnage, le côté le plus saillant d’un fait, le point de vue le plus dramatique d’une époque. Quand il en est aux anciens temps, il répète les chroniques populaires avec abandon et naïveté, comme s’il les avait entendues un soir d’hiver sous le toit de quelque vieux conteur. Quand il arrive à l’époque moderne, il a le talent de mettre en relief tout ce qu’il y a de poétique dans les annales qu’il retrace. Il n’analyse pas, il peint. Si, comme il est aisé de le croire, il a voulu, en écrivant son ouvrage, populariser l’histoire, on peut dire qu’il a parfaitement réussi, car son ouvrage est fort répandu et recherché de tout le monde.

M. Strinnholm est un écrivain d’une nature plus grave et plus réservée, un de ces hommes d’étude qui, ayant compris leur vocation, se tracent une route déterminée et ne s’en écartent plus. Il a montré qu’il était dévoué à l’histoire par la ténacité avec laquelle il a poursuivi ses recherches, malgré le peu d’encouragemens qu’il obtint d’abord, malgré les obstacles de fortune qui durent plus d’une fois l’arrêter. Il composa, en 1819, une histoire de la Suède sous la domination des Wasa. Plus tard il sentit le besoin de remonter à l’origine de la monarchie, et publia, en 1834 et 1836, deux volumes qui lui ont fait beaucoup d’honneur dans le monde savant.

Le premier renferme une dissertation très détaillée et très complète sur les premières notions relatives à la Scandinavie, sur les migrations des peuples du Nord, sur leur mythologie, et une histoire de Suède depuis l’arrivée d’Odin en Upplande jusqu’au XIe siècle, c’est-à-dire jusqu’au christianisme. Un des chapitres importans de ce livre est celui qui traite de la constitution et des lois de la Suède au temps du paganisme : c’était une question très confuse, que M. Strinnholm a considérablement éclaircie.

Dans le second volume, il raconte les expéditions et les mœurs des Scandinaves, leurs conquêtes au Midi et leurs courses sur les mers du Nord. M. Depping avait déjà traité ce sujet dans un livre dont les critiques danois ont eux-mêmes loué le mérite. L’historien suédois, en revenant sur les mêmes faits, a su leur donner un nouveau développement par une étude plus vaste et plus approfondie des sources islandaises.

M. Strinnholm a un talent remarquable d’exposition, un style clair, facile, parfois un peu prolixe. Il ignore l’art de resserrer les évènemens pour leur donner plus de force. Il suit pas à pas son sentier d’érudit, compulsant, annotant, rapportant avec bonne foi ce qu’il a appris, et jetant çà et là un jugement vrai. Il ne dramatise pas son histoire, il raconte ; sa narration est lente, mais sûre et fidèle.

Le public a témoigné dans les derniers temps une faveur toute particulière à cet écrivain, et le roi vient de lui accorder une pension. Il poursuit main-