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LETTRES
SUR LA SITUATION EXTÉRIEURE.

i.
Monsieur,

La politique paraît destinée à ne rien perdre de son activité pendant l’intervalle qui doit séparer les deux sessions. Mais cette activité changera de but et de caractère ; elle s’exercera dans une autre sphère et sur un théâtre différent. Deux questions de la plus haute importance, qui se sont réveillées en même temps, occuperont le ministère, plus maître de ses mouvemens en l’absence des chambres, et rendu à toute la liberté dont il a besoin, pour se livrer plus complètement à l’étude silencieuse et à la froide discussion des intérêts qu’elles mettent en jeu. C’est de la question d’Orient et de la question belge que je veux parler. Quand le ministère, dans l’affaire de la conversion, opposait à l’impatience des partisans de cette mesure et de son exécution immédiate, des raisons d’inopportunité qu’il aurait pu indiquer avec moins de réserve, la mauvaise foi des partis refusait d’en tenir compte. On affectait de n’en pas croire ses plus solennelles assurances ; on feignait une confiance toute nouvelle dans le maintien d’une sécurité que jusqu’alors on avait si souvent représentée comme mensongère et précaire ; on renonçait, pour un moment, à évoquer le fantôme des coalitions du Nord ; on ne voulait voir, dans l’état de l’Europe, que garanties de paix, que promesses de calme et de stabilité. Du ministère ou de l’opposition, qui était le plus sincère dans son langage ? De quel côté se trouvaient la vérité, la raison, la juste appréciation des chances prochaines de l’avenir. Ce n’est pas que nous voulions, à notre tour, rien exagérer en sens contraire. Nous n’irons pas ainsi parler d’avance le langage que s’apprête à tenir l’opposition. Nous laisserons l’exagération du danger à ceux qui ont exagéré la sécurité ; car on ne manquera sans doute pas maintenant d’annoncer tous les jours la guerre pour le lendemain, et d’exploiter tous les incidens, toutes les phases que les deux questions récemment soulevées ont encore à traverser, pour accuser le gouverne-